A ma gauche, Fangs (2002) de Kelly Sandefur (Street Dancing Ninja, Fantôme.com, etc.), à ma droite The Roost (2005) du prodige Ti West (You’re Next, X, Pearl, etc.) qui signe ici son premier film .

Tous deux se présentent comme des films d’horreur dont la charmante menace est volante, qui dort la tête en bas et qui fait peur aux gens. Oui, il s’agit de la chauve-souris, pas du vampire, un cousin éloigné.

Mais l’un et l’autre utilisent les chiroptères de manière bien différente.

The Roost était sombre et sérieux, mystérieux et intriguant. Fangs, c’est tout le contraire.

Fangs, c’est une série B tellement B qu’elle le sait. Elle offre un second degré manifeste qui vire parfois à la bêtise et dont les échantillons ici présentés risquent de vous spoiler quelques passages, soyez prévenus.

Une fois de plus, l’intrigue n’est guère innovante, avec des chauve-souris génétiquement modifiées évadées dans une petite ville qui était pourtant si tranquille, Scottsville. John Winslow, le beau mais veuf vétérinaire de la ville s’associe à une des nouvelles inspectrices, Ally Parks, pour tenter de comprendre ce qui pousse ces chiroptères à ne tuer que certaines personnes.

Mais Fangs ne veut pas se montrer sérieux. Il ne veut pas faire peur. Les quelques morts se feront hors champs, et tout au plus le spectateur verra parfois un corps lacéré de quelques égratignures, mais le plus souvent ce sera un sac mortuaire qui signifiera le décès. Y compris pour un chien.

Le film semble d’ailleurs avoir une peur manifeste de l’obscurité, qui en est quasiment absente. Les sombres ombres découpées de The Roost sont bien loin. Les projecteurs fonctionnent à plein régime sur Fangs. Même une courte expédition dans une grotte est trop lumineuse. Pourtant, il y a bien des scènes qui sont sensées se passer de nuit, les chauve-souris aiment la pénombre. Mais à Scottsville il semble y avoir un sacré dérèglement climatique.

L’angoisse est donc absente ou alors elle est dédramatisée. La moindre petite séquence angoissante sera vite achevée, le plus souvent par un faux sursaut ou bien par une petite plaisanterie.

Tout semble prévisible et surtout exagéré. L’intrigue laisse entendre ce qui va se passer par la suite, pour que le spectateur ne soit jamais perdu. Les deux enquêteurs qui se chamaillent se retrouveront bien sur ensemble. Peu importe l’évidente évidence du pourquoi du comment, le supérieur de l’inspectrice évidemment obtus demande à ce que soit fermé l’enquête puisqu’il veut que ce soient des morts naturelles (sacrés infarctus dans la région, ils créent des morsures sur les corps).

La majeure partie des personnages sont volontairement clichés, et les pires sont les plus gratinées. A l’image de ces deux étudiantes du labo de médecine complètement pimbêches ou du collègue d’Ally, un trouillou complet qui se lamente à chaque fois qu’un corps est trouvé.

Le film assume parfois son ridicule, à l’image des protections enfilées pour explorer une grotte : une combinaison de baseball et une autre de football américain.

Même les personnages les plus sérieux s’échangent plaisanteries et répliques qui se veulent amusantes. Il y a souvent une petite phrase pour détendre une atmosphère qui serait restée quelques minutes trop sérieuses. Ce pourrait être de l’humour noir, surtout pour un film qui parle de gens tués. Mais non, c’est bon enfant, parfois naïf.

Les comédiens impliqués jouent d’ailleurs avec une très grande décontraction, très détendus. Les personnages ne semblent de toute façon pas trop inquiets par les événements. Pour atteindre ses 1h30 réglementaires, le film meuble un peu, s’attarde sur certains points, fait parler ses comédiens. C’est fait avec une telle détente que c’en est presque amusant, à l’image de cette mise en scène, très classique, avec ses plans taille et ses gros plans, pour bien voir les comédiens cabotiner. IMDB classe pourtant Fangs comme film, mais il ne serait pas étonnant que ce soit un téléfilm, il n’a pas la carrure pour une sortie au cinéma.

Derrière ces chauve-souris, il y a un homme qui est responsable de ces attaques meurtrières. Mais le véritable méchant est un promoteur immobilier véreux et caricatural, qui falsifie les documents pour virer les fermes familiales pour créer de nouveaux logements. Certes, il a le chef de la police dans la poche. Mais personne dans la ville ne semble s’inquiéter de la légalité de cette urbanisation galopante. Ils sont tous un peu concons à Scottsville, c’est certain.

Ce promoteur cupide et malhonnête apparaît donc comme un méchant de film pour enfants, car il est caricatural et en veut au bien commun, à l’identité et au passé de cette ville tranquille. Ce qui pose la question de ce film et de son public.

Car il grossit tellement tout ce qu’il contient, son histoire, ses personnages, son humour, qu’on peut se demander si Fangs est un film d’horreur qui ne voulait pas l’être. Il est tellement grand public, sans rien d’angoissant, qu’on se demande quelles sont ses intentions. Mais sans personnages jeunes et un duo de héros d’âges murs, il ne peut pas non plus être une comédie familiale. Fangs est donc cette curiosité un peu bâtarde, maladroite et probablement plus mauvaise que réussie. Mais qui interroge sur son positionnement complètement bancal.

SimplySmackkk
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le 21 juil. 2023

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