Fanny
7.6
Fanny

Film de Marc Allégret (1932)

N'ai-je donc tant vécu que pour cet enfant, Fanny ?

Bon, les souvenirs d'enfance, la ville, le premier film, c'est fait.


Le film a suite ne date pas d'hier, vous n'êtes pas sans le savoir.
En 1932, donc, c'est d'abord à la pièce que Pagnol (qui n'est pas encore réalisateur) donne un prolongement. Les problèmes qui s'accumulent (acteurs, conflits, contrats) pour monter Fanny n'augurent rien de bon. Mais le texte est là, et il est bon.
Pour le cinéma, devant le succès du premier opus et bientôt de sa suite sur scène, tout rentrera vite dans l'ordre et la distribution pourra présenter une cohérence salutaire, à l'exception d'Auguste Mouriès qui remplace Paul Dullac un peu tristement il est vrai, dans le rôle d'Escartefigue,.


La joliette et le vieux porc


Le premier changement fort que propose Fany par rapport à son devancier est un évident surcroit de moyens, financiers et artistiques. Marc Allegret possède son petit bagage (un documentaire, plusieurs courts et au moins 4 long-métrages) et la réussite est d'abord visuelle.
Tout, dans les premières minutes, ressemble à un "Marius 2, le retour: bigger, louder, faster / il revient et il n'est pas content". Plus de personnages, plus de décors, plus de plans. Mais sans que cela ne soit entaché des habituelles pesanteurs propres aux surenchères modernes.
On voit la Major, on va faire un tour à Notre Dame de la Garde, on se ballade devant Noailles, le film s'aère et ce sont tous les enjeux scénaristiques qui prennent de l'ampleur.


Marius ne devrait bâtarder


Alors ce qu'il y a de plus rigolo, dans Fanny, c'est qu'on commence à voir poindre une des ficelles délicieuses de l'écriture de Marcel. Une ébauche du système Pagnolesque.
Cette façon, entrevue dans Marius et plus tard si merveilleusement développée dans la femme du boulanger par exemple, qu'ont deux (ou plus) protagonistes de parler d'une situation supposément éloignée d'eux alors que nous savons (de Marseille) -et qu'ils savent pertinemment- qu'ils sont les sujets principaux du débat.


Ce procédé, mignon comme tout, permet à l'auteur et ses magnifiques interprètes de faire passer une foule d'émotions qui, sans ce subterfuge, pourraient avoir l'air lourd ou emphatique.
Derrière, évidement, on retrouve l'habituel cortège d'expression savoureuses, de répliques gouleyantes ("Vé ! La taille de ce revolver ! Il ne lui manque que les deux roues pour faire un canon !") et de remarques sur la vie quotidienne qui chatouillent agréablement les neurones (on en parle, de la vie chère et des impôts ?)


Marius a les boules mais cherche à embrasser Fanny


Plusieurs scènes sont d'incontestables réussites, comme ce moment, qui alterne rires et larmes, pendant lequel César et Panisse décident de la destiné du fils de Fanny à venir. D'autres, plus immédiatement pittoresques font peut-être moins mouche aujourd'hui (la partie de pétanque, le bateau de monsieur Brun) dans le mesure où, tellement reprises dans l'esprit depuis, elles n'apparaissent plus que sous la forme caricaturée qu'elles ont revêtues sous leurs multiples déclinaisons postérieures.


Pour autant, ses immenses qualités dépassant largement ses défaut mineurs, Fanny est sans doute, en terme d'écriture, de jeu et de réalisation, l'exercice le plus abouti de la trilogie Marseillaise, son moment le plus pur et le plus jubilatoire, sa pierre angulaire.


Carreau sur place !


(to be continued...)

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le 1 août 2013

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guyness

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