Ce film sud-coréen tiré d'un roman « censuré pour outrage à la pudeur » (c'est brandi en ouverture) envoie du 'lourd'. Il ne se pose pas de questions de goûts ou de conviction. Gojitmal ('mensonges' plutôt que 'fantasmes') est l'album-souvenir d'un tandem sado-maso, introduit comme une espèce de sujet de reportage mais ne rendant jamais de comptes, sinon par quelques bouts d'entretiens vaseux. Il restera bien un faux 'film maison', tenant le spectateur dans l'intimité de cette jeune fille et de son aîné de 20 ans.
Au départ J, 18 ans, vient à Y pour le dépucelage. Elle est envoyée par son amie Ouri, une décrocheuse qui semble l'utiliser dans ses fantasmes. Y le professeur pervers honore ses attentes et va au-delà. Il a besoin de dépasser la platitude de la sexualité ordinaire, elle accepte (contrairement à sa femme). Bientôt ce stade 'supérieur' de sa sexualité en appellera un autre – en fait, une version alternative. La première fois, il s'agit de redonner confiance à Y dans un coup de déprime. Elle, si dévouée et admirative, s'épanouit automatiquement dans sa nouvelle posture. Y a retourné la violence contre lui et il est plus heureux et bestial que jamais. La planche, c'est lui qui va la prendre – et la réclamer !
La provocation est certainement l'idéal du film, mais l'exercice s'apparente d'abord à une farce auto-destructrice. La seule réaction sûre et positive qu'elle génère est le rire. Les illusions ou les récits que se fait Y, l'affirmation de ses préférences écœurantes, la débilité de ses instincts, font de Gojitmal, à son meilleur, un divertissement boueux. Le spectateur y est mis à l'aise et peut jouir du sarcasme ou de la moquerie ; ou d'une forme de compassion, d'intérêt candide. La seconde option sera empruntée par les gens trouvant ça 'positivement' dingue et aptes à s'en émouvoir avec complaisance. Il reste bien sûr tout un boulevard pour placer les horrifiés, mais c'est la réaction la plus fausse et sociale qui soit.
Dans tous les cas le résultat reste petit. Le voyeur est repus plus que l'amateur de chair embobinée. Quand c'est encore doux, ce n'est que baisers baveux tirant sur le prolapsus buccal, plans dégueulasses, germes de sexualité tordu et ennuyeuse. Ensuite et malgré une orientation 'anus' très prononcée et salement puriste, les amants sont des monomaniaques du coup de trique. Les nuances passent rapidement hors-champ (avec leur touche d'humour différencié : panneau 'deuxième trou' conduisant à une fellation, dernier conseil de sodomie), car il faut progresser d'un rendez-vous sur l'autre vers la quête du Graal, soit le plus gros et brutal des bâtons. Gojitmal c'est crapoter dans la mouise et s'enfermer dans une petite boîte, une boîte de cul. Ils vieillissent un peu, de motel en motel jusqu'à la dernière pseudo-bourre en France ! Le mobilier est important, j'aime/j'aime pas, rien d'énorme mais c'est dans l'axe.
Les scènes où les deux sont séparés, voire toutes celles où ils se trouvent à l'extérieur (ou s'entretiennent au téléphone) sont une série de bouts de vie insipides. Elles peuvent avoir un intérêt pour les locaux (ou passants/touristes) qui reconnaîtront des lieux ou des structures – d'ailleurs, si la pratique de J et Y peut 'parler' c'est en tant que prolongation de la traditionnelle fessée (on a aussi les fantasmes et les fixations qu'on nous a abandonnés ou infligés). Quelques effets viennent varier la mise en scène : accéléré, puis ralenti flouté lorsque J se fait battre. Cette bonne idée, traduisant l'ivresse et la confusion, est gâchée en étant reproduite n'importe comment (tournant au clip abstrait et 'bloqué', ou de trip 'house' fauché). L'orchestration est assez basique, sur tous les plans ; Jang Sun-woo joue un peu sur le coté DV/proximité et 'film in progress', mais c'est juste un cadre et une méthode évitant d'être trop connement cru.
https://zogarok.wordpress.com/2016/11/17/gojitmal-fantasmes/