Ce film nous rappelle avec nostalgie le bon temps de 1936. Je n'étais pas là quand Jehan Jaurès a été assassiné mais je sais que c'était triste à l'extrême. Les gens, les badauds comme les amateurs de la politique, pleuraient tous leur chaude pisse. Oui, on peut le dire, c'était un moment triste à l'extrême. Mais au-delà de ça, il y avait aussi beaucoup de joie à l'époque. Par exemple, les enfants étaient plus rieurs et jouaient de l'accordéon. Même les manchots. Les hommes portaient des bérets, ce que l'on ne fait guère plus, sauf dans les pays de Bretagne ou de Béarn. Il y avait également encore très peu de femmes à l'époque, ce qui était plutôt un avantage quand on sait les difficultés de cohabitation des hommes et des femmes. Exemple : les mâles et les femelles éléphants vivent dans des troupeaux séparés et ne se rencontrent qu'à la saison des amours. Je trouve ça très bien. Et puis, il n'y avait pas tous ces attentats comme on voit maintenant, donc on n'avait moins peur de se rendre à Paris, la ville lumière, nous provinciaux. En résumé : je dirais que c'était une époque beaucoup plus heureuse et moins anxiogène.
C'est exactement ce que nous conte ce film et on peut compter sur la bonhomie naturelle de Gérard Jugnot pour nous communiquer cette joie. Tout est vraiment très bien fait, bravo à l'équipe technique. On appréciera également l'absence de violence (il faut dire qu'il y en avait très peu à l'époque) et surtout la politesse des acteurs. Je m'interroge cependant sur un détail historique du film. À un moment, dans un troquet typique de l'époque, un personnage s'épand en de longs discours d'ordre politique jusqu'à s'affirmer du nazisme. Hélas, cet élément est anachronique ; 1936 était encore une période de paix, la Seconde Guerre Mondiale et son navrant Holocauste n'étant intervenus qu'à partir de 1940, il ne pouvait donc pas y avoir d’occurrence de nazis à l'époque puisqu'ils n'ont surgi que 4 ans plus tard. Plus de réalisme historique aurait donc été appréciable, tel que dans Shaolin Soccer ou dans L'Assassinat de Trotsky. Monsieur Gérard Jugnot aurait certainement gagné à ouvrir un livre d'histoire. On lui pardonnera volontiers au regard de la joie qu'il instaure dans nos cœurs.