Le cinéma des premiers temps est hypnotique. On y rentre comme dans un rêve, et la phrase de Jean Cocteau prend alors toute sa signification :
"Un film n'est pas un rêve qu'on raconte, mais un rêve que nous rêvons tous ensemble en vertu d'une sorte d'hypnose, et le moindre défaut du mécanisme réveille le dormeur et le désintéresse d'un sommeil qui cesse d'être le sien."
Oui. Le cinéma muet est un rêve. Qui nous embarque loin, très loin, dans les tréfonds d'une époque complètement révolue, celle des années 20, mais aussi par des images, des plans, une façon de filmer, de mettre en mots les images, totalement inconnue de nos yeux d'hommes et de femmes modernes du XXIe siècle.
Nous n'avons plus ça maintenant. Ces façons uniques de filmer, ces images à couper le souffle, ces grains, ces noirs et blancs, ces regards, ces exagérations d'expressions comme pour accentuer les émotions par le manque de parole. Et la musique. La musique surtout. La musique dit tout. La musique dans le cinéma muet est un personnage à part entière. C'est elle qui dicte tout du film. Et elle y est tout le temps d'une immense beauté, bouleversante, d'une grandeur incroyable, qui nous fait perdre pieds dans une sorte de complète hypnose, un monde parallèle dont on a du mal à se dépêtrer lorsqu'on sort des images, de toute cette incroyable musique.
Voilà comment on pourrait résumer Faust : un monde parallèle où le baroque prend tout l'écran, où la noirceur transparaît par des flous, des images, des morceaux de particules à couper le souffle, des effets incroyables, et l’irréalité constante d'un monde où les anges et les démons vivent, ou le bien et le mal est présent, partout, où la foi guide les voyageurs, où l'amour triomphe, à chaque fois.
L'expressionnisme allemand sort ici toutes ses griffes pour faire vivre des décors parallèles, étranges, sidérants, au manque de perceptive complète propre à l'Expressionnisme Allemand du début du siècle. C'est là quelque chose d’étonnamment beau, intraduisible de nos jours.
Faust avec sa terreur et sa fin inoubliable, intense, d'une beauté perdue, irréelle.
Aujourd'hui, au risque de passer pour du mièvre, du cucu, on ne peut plus filmer d'histoires d'amour comme il y en avait jadis à l'époque du muet jusqu'aux années 30-40. La magie d'un cinéma effarant de simplicité à l'intrigue toute simple et presque schématique. Et ça s'envole encore, jusque dans les tripes.
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