Felicita débute par une énorme blague qui donne le ton, d'emblée. Est-ce que ce monde est sérieux ? Visiblement, le couple du film de Bruno Merle a choisi de vivre libre, hors de la "normalité" et conséquemment de toute morale conventionnelle, sous l’œil perplexe voire consterné de leur fillette. Tout est là, dans ce contraste entre des parents irresponsables (?) et une enfant beaucoup plus adulte. Le scénario de Felicita est imprévisible, c'est son atout premier, et se découvre sur un rythme soutenu, pendant 82 minutes. Malgré cette brièveté, il s'agit tout de même de tenir la distance entre fantaisie et absurde, tout en ménageant des plages de suspense et d'émotion. Felicita y parvient assez souvent, grâce à quelques trouvailles narratives et à une mise en scène sans ampleur mais efficace. Peu de trous d'air à signaler en définitive, l'idée étant aussi de ne pas tout expliquer et de laisser au spectateur le soin de combler les vides. Le film peut bien patiner parfois ou sembler aller nulle part, l'interprétation haut de gamme de Pio Marmaï (qui aurait fait merveille dans la comédie italienne) gomme les temps faibles de Felicita et ses dialogues avec son rejeton, subtilement jouée par la propre fille du réalisateur, sont délicieux. Il ne faut pas demander à Felicita plus ce qu'il a à offrir : des moments de doux délire avec un doudou, une crique bretonne, un cosmonaute, un casque anti-bruits et un grenier mystérieux, entre autres ingrédients. Quant à savoir si ce monde est sérieux, la réponse est toute trouvée.
Merci à SC pour cette projection et la rencontre avec un Bruno Merle inspiré.