Film réputé comme étant le meilleur de son auteur, Paul Vecchiali, et connu pour être adoré par Pasolini, le cinéaste allant même jusqu'à inviter les deux comédiennes (Hélène Surgère et Sonia Saviange) dans Salo ou les 120 journées de Sodome afin d'y rejouer une scène du film.

Femmes, femmes s'ouvre en chanson, chanson donnant le titre au film, sur des images inserts de grandes actrices de l'époque : Darrieux, Garbo, Morgan, Dietrich, Crawford, ...
Ce générique, à lui seul, donne le ton et l'enjeu du film. Il y sera question, de comédiennes, de femmes, d'instants figés, photographiques, images nostalgiques et lointaines d'une jeunesse passée, de mort.
Femmes, femmes c'est deux comédiennes, Surgère et Saviange, deux comédiennes pour lesquelles l'instant photographique (celui des gloires citées plus haut) est déjà loin. Deux comédiennes ratées, déambulant au fil des journées dans un appartement de Montparnasse, tapissé de ces mêmes photos de stars des années trente. Elles discutent, elles rient, elles jouent, elles boivent (beaucoup). L'appartement étant pour elles une sorte de scène ou la représentation serait permanente. C'est un vase clos, un ailleurs spatial et temporel, un microcosme qui n'appartiendrait qu'à ces deux femmes.
Cette théâtralisation de la vie, tantôt drôle, tantôt grotesque, tantôt tragique, est soulignée par la mise en scène de Vecchiali, exclusivement, ou presque, en plan séquences, souvent fixes. Et l'impression de voir se jouer devant nos yeux une représentation théâtrale relevant en fait de la réalité et de la vie même à quelque chose de bouleversant.
Semblant ne vivre que par le jeu, ne dialoguer que par le jeu, les vérités insinuées n'en sont que plus troublantes. C'est le cas par exemple lorsque Surgère fait répéter la pièce Antigone à Saviange. La poussant dans ses retranchements émotifs, cette dernière, avouant en pleurs la perte d'un enfant à l'accouchement. Et Surgère de la féliciter par un « Voila ! Ca c'est Antigone ». On aurait envie de dire « voila ! ca c'est le cinéma », tant tout ce qui est dit durant cette scène pourrait en constituer une synthèse.
Et lorsque la communication ne parvient pas même à passer par le jeu, elle passe par la chanson (et on rejoint un peu ici le travail de Demy). On chante ce que l'on ne peut dire, on maquille la dureté des mots par le procédé musical.
C'est souvent le cas face à des interlocuteurs externes au microcosme.
Car le film ne reste cependant pas recentré sur les deux comédiennes. Il s'ouvre par moments. Il s'ouvre vers d'autres personnes, vers le monde, mais vers un monde dans lequel elles ne peuvent réellement vivre, pas qu'elles le rejettent, pas qu'il les rejette, mais simplement que la symbiose n'est plus possible. Le monde n'existant plus pour elles, leur monde c'est la bulle, c'est l'appartement, un monde fictif, détaché.
Le plus touchant là-dedans étant la sincérité dans leur geste. On ne sent jamais réellement d'autodestruction, de lutte, mais un détachement, progressif, deux ombres fantomatiques ayant au-dessus de leur tête le puissant son des tics-tacs de la pendule.
Le monde c'est aussi la mort, une mort qui plane, qui épie, que l'on moque parfois, les blagues récurrente avec le médecin. La mort est à la fenêtre de l'appartement, donnant sur un immense cimetière.
Et lorsque lors d'une magnifique ultime séquence, Surgère se retrouve seule devant cette fenêtre, lumineuse et contrastant avec l'obscurité de la pièce, un verre à la main, filmée en travelling arrière, enfermée peu à peu dans un cadre terrifiant cerné deux bandes noires, les cris de souffrances de Saviange se faisant entendre en hors champs, on ne peut qu'être bouleversé.
Teklow13
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le 14 juin 2012

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