Beaucoup pensent que ce film n'est qu'un éloge d'une sorte de société altermondialiste nihiliste prônée par le personnage de Brad Pitt; si bien qu'on reproche souvent à Fight Club d'être une repompe presque intégrale du film Tokyo Fist. Or si ces deux films racontent à peu près la même chose (un gars qui ne se reconnaissant plus dans une société morte et aseptisée recommencent à vivre dans la destruction de soi), le point de vue est radicalement différent, puisque là où Tokyo Fist reste plutôt sérieux et premier degré tout le long du film, Fight Club se sert du ridicule du personnage et de son idéal pour mettre en évidence la faillite d'une société rationalisée à l'extrême. Il est en effet difficile de reconnaître qui est le plus médiocre entre les collègues d'Edward Norton, dont l'humeur et la personnalité se reflètent dans la cravate qu'ils portent, et qui se rapprochent aussi beaucoup de Chloé, la cancéreuse qui n'attends plus que de mourir; ou bien edward norton lui même et son idéalisation contradictoire et même un peu niaise de l'anti conformisme incarnée par Brad Pitt, sorte de fantasme homo d'un Manu Bovary paumé, non plus par ses romans à l'eau de rose, mais par tous les messages contradictoires post trente glorieuses sur la société de consommation. Personnage tout à fait irréaliste comme il a été dit à de nombreuses reprises, ambivalent entre son rejet du conformisme, de l'image et du matérialisme, alors qu'il arbore fièrement nuit et jour son bouc parfaitement taillé, sa coupe faussement en bordel, et sa clope au bec, et est même assez misérable puisque réduit à pisser dans les soupes dans le restau de luxe pour se sentir exister.
Donc voilà, si le film a un propos intéressant, il est je trouve, victime de son ambition et de sa prétention. Déjà si on assiste à une première partie assez intéressante, la seconde avec la nouvelle société nihiliste crée par Tyler Durden, qui même si elle reste dans la continuité du ridicule et de la contradiction incarnée par son créateur, s'enfonce dans une espèce de caricature un peu bas de gamme, puisque si on reconnait que le personnage de Brad Pitt peut effectivement représenter la faillite contradictoire de l'anticonformisme chez beaucoup de personnes (et pour s'en convaincre suffit de voir tout les t shirt dégueulasses che guevara vendu à prix exorbitant), là leur truc du projet mayhem on y croit pas une seule seconde tant ses membres sont cons comme leur pieds(moi ils m'ont rappelé les apôtres dans la vie de Brian qui réinterprètent tout n'importe comment pour essayer de croire en quelque chose) même si c'est justifié, c'est très mal fait. Niveau casting c'est pas la joie non plus entre un Edward Norton complètement transparent, une Helena Bonham Carter exaspérante du début à la fin, et un Brad Pitt... qui fait du Brad Pitt, bon on aime ou on aime pas, moi si d'habitude je l'aime bien, là dans ce film c'est un peu la goutte d'eau qui fait déborder le vase. De même, les dialogues et l'ambiance générale sont assez fatigants, puisque chaque ligne de dialogue est calibrée pour devenir culte mais peinent à dépasser le lieu commun(blablabla les choses qu'on possède finissent par nous posséder, première règle on ne parle pas du fight club... on a compris oui), et cette impression générale de voir Fincher se balader durant tout le film avec une pancarte avec écrit en gros "Regarde comment mon film est COOL, admire mon génie et mon film culte", ça fait une ambiance rigolote sur les 20 premières minutes, mais ça devient vite ennuyant.
En conclusion, j'ai trouvé le propos du film assez intéressant, mais plombé par sa prétention, et cette envie de Fincher de faire un film "cool" par tous les moyens. Et puis il faut dire que ça cède un peu trop à la facilité (bah oui un film sur la société de consommation dans les années 90 il s'est pas trop foulé le david). En même temps il est vrai qu'il était difficile de faire un bon film avec un matériau de base aussi immonde que le torchon de Palahniuk.