Festival de cinéma d'Alès, pour une avant-première émouvante du documentaire sur les témoignages de femmes dans le milieu du cinéma très misogyne. Quand Julie Gayet demande ce que la salle a pensé de son documentaire, on a l'impression que le film continue : les exemples de femmes qui travaillent en cinéma et sont soumises à une image d'infériorité fusent, avec des récits qui nous donnent envie de hurler de colère face à une réalité discriminatoire digne d'un autre temps. On se rappelle alors notre quotidien avec les clients du cinéma (ceux qui vous demandent pourquoi vous ne travaillez pas en jupe, ceux qui préfèrent aller voir le collègue masculin, et ceux qui disent que vos avis positifs sur telle comédie romantique et négatifs sur tel thriller ne valent rien "parce que vous êtes une fille, c'est obligé"...). Et quand Julie Gayet vous dit que l'année dernière nous avons atteint une part record de réalisatrices parmi les films sortis, mais que ce chiffre est...27%, on sait que le propos de FilmmakErs est d'intérêt public. "Et à l'étranger, ce chiffre est bien pire...". On soupire, encore. Même si la forme du documentaire nous a un peu gêné (trop de séquences, trop courtes, coupées parfois net), avec des répétitions des précisions sur le nom et le pays des intervenantes qui sont dispensables (cela nous tente de les lire, et on sort des récits racontés), avec parfois des arguments un peu faciles ("tous les hommes sont comme ça", "ils ne peuvent pas comprendre"... On ne partage pas ces avis, qui continuent de cliver les genres qui le sont déjà assez), au final on a surtout découvert des femmes formidables, qui se battent pour leur reconnaissance dans des pays encore plus hostiles au "deuxième sexe" dans le monde du cinéma que ne l'est le nôtre (qui commence à bouger, petit à petit...). Un dernier point : on n'est pas (mais alors : pas du tout) d'accord avec l'analyse faite des œuvres d'Almodovar (ce n'est que subjectif, mais l'intervenante espagnole nous a donné quelques sueurs froides avec sa vision d'un Almodovar "misogyne"...). Les archives sont bien choisies, on raffole de l'interview de Susan Sarandon et Geena Davis (Thelma et Louise), l'hommage à Agnès Varda est vibrant, et encore une fois : vive les femmes dans le cinéma, que les récalcitrants se le tiennent pour dit. On ne le dira plus pour la danse : Eh bien, maintenant, tournez, mesdames, tournez.