Daphné, adolescente incarcérée pour vol avec violence, dans une prison pour mineurs, se bat pour pouvoir exprimer ses sentiments, manifester son amour, forcer la loi pour retrouver la liberté. Et quel avenir peut-elle ou peuvent-ils se construire? C'est la question que Claudio Giovannesi, réalisateur de Fiore, ouvre à la fin de son film présenté à la Quinzaine à Cannes et vu au Forum des Images.
Les films sur l'adolescence ont toujours traversé le cinéma et, à chaque fois les réalisateurs, par des histoires singulières, contribuent à mieux comprendre cet âge du passage de l'enfance au monde adulte. Étape vers l'autonomie, chemin initiatique, moment de confrontation avec le regard des adultes voire un monde qu'en amont les avait déjà stigmatisé ou rejeté.
C'est ainsi, dans le nouveau film de Claudio Giovannesi, sans trop de discours, qu'on comprend le parcours de Daphné, placée dans un établissement carcéral pour mineurs, après avoir été arrêtée suite à une énième violence contre d'autres adolescents, pour un portable.
Ce film nous montre alors la vie collective dans le secteur des filles, sous le regard peu éducatif mais réglementaire des surveillantes. La loi de la plus forte, les alliances qui se font et se négocient dans le groupe, les ateliers, l'infirmerie, les transgressions au règlement, les complicités. De l'autre côté de la cour, c'est l'aile des jeunes hommes. Ils se regardent derrière les barreaux, ou les grillages dans la zone de promenade et de sport.
La distribution des repas, sous la responsabilité des 'pensionnaires' devient le moyen de communication et c'est par là que, progressivement, Daphné et Josh vont se découvrir, s’entraider et tomber amoureux.
Chacun essaye de trouver la sortie. L'éducatrice de Daphné cherche un accueil chez son père pour qu'il puisse la loger et se porter garant. Mais lui-même est dans une grande précarité, sorti depuis peu de sept ans de prison et n'est en capacité de lui proposer qu'une permission de week-end.
Josh, souriant gaillard, volontaire et apprécié, finit par obtenir un apprentissage dans une grande boulangerie. Daphné, toujours enfermée, n'en peut plus et saisi la permission pour retrouver son copain.
C'est cette rencontre et son dénouement que le réalisateur nous invite à suivre et à appréhender le devenir de Daphné et de Josh.
La trame cinématographique, la qualité et l'observation des plans font de ce film un travail très accompli. La prise de vues des interprètes, les séquences de la vie collective, les amitiés fortes qui se nouent entre les filles, sont rendues avec une grande discrétion et un énorme respect des personnages qu'elles interprètent. La fulgurance de Daphné (qui a gardé son vrai prénom) devient, par la maestria de Claudio Giovannesi, une jeune actrice de talent, sans doute à explorer.
Les films sur l'adolescence confrontée à l'avenir montrent, souvent violemment, l'incertitude, en quelque sorte le «no future». Une jeunesse qui n'a pas réussi de formation, peu instruite, poussée vers la périphérie des villes, souvent en colère ou résignée, reléguée socialement, comme ses parents, vers les «no man's lands» de la démocratie. Soutenir ces films, les voir, les diffuser, en parler, les montrer dans les lieux de décision, serait une contribution pour reconnaître que le lendemain sera fait avec et par eux, s'il est encore temps de les préparer.
https://blogs.mediapart.fr/arthur-porto/blog/080616/fiore-une-fleur-rebelle