First Kill, Steven C. Miller, U.S.A, 2017, 1 h 37

Un trader en rupture avec son fils passe son temps à négliger ce dernier, bien trop pris par son travail. Il décide alors de l’emmener en week-end sur les terres de son enfance, pour lui apprendre à chasser, qu’il découvre la jouissance de coller quelques plombs dans un cerf qui n’a rien demandé à personne. Le rejeton, un peu dégouté par ce père qui semble vraiment ne rien cerner de lui, n’a pas envie de tuer un cerf… Tout ce qu’il veut c’est améliorer son score à « Fortnite », pas prendre un gros flingue et dégommer un pauvre animal pour faire plaisir à papa.
« First Kill » est donc un drame familial, doublé d’une petite critique de la culture des armes et de la mort dans l’Amérique profonde. Même un trader new-yorkais tout fade estime que pour devenir adulte un mioche de 12 piges doit tuer un animal, pour connaître la sensation de puissance que cela procure. Ce besoin égoïste s’appuie sur l’attitude de son fils, qui n’en a clairement rien à foutre. C’est donc une rupture consommée et creusée que ce père à côté de la plaque alimente.
Puis patatras, ce qui doit arriver arrive, et Will doit tout faire pour retrouver son fils kidnappé. Prêt à tout pour récupérer la prunelle de ses yeux, il se montre enclin à tuer autre chose que des animaux. De ce père négligeant, très policé, ressort alors une bestialité de circonstance, en lien avec le fait qu’il réalise à quel point il a oublié d’être présent pour son fils et surtout, de le comprendre. Dès lors, le personnage s’étoffe et évolue, pour se métamorphoser totalement à la fin, par une construction classique de rédemption.
Pour ce qui est du fils, Danny, celui-ci est kidnappé par un type qui court après un butin. Rien de bien original, si ce n’est que son ravisseur, Levi, ne correspond pas au « méchant » stéréotypé, et une amitié naît entre lui et Danny. Dans une variation assumée du « A Perfect World » de Clint Eastwood, le film (dont le titre annonce quand même son lot d’action) nous entraîne vers l’inattendu, comme bien souvent chez Steven C. Miller. Les bad guys ne sont pas ceux que l’ont croit, et les marginaux s’avèrent finalement plus humains que ceux qui apparaissent bien intégrés au système.
Ça, c’est pour la toile de fond de « ’First Kill », qui alimente la narration des premières minutes du métrage jusqu’à son générique. Dans la forme, cet actioner survivaliste s’avère nerveux et brutal, mais loin de se résumer à tout superflu de stupidité. De plus, la violence trouve une justification à travers les actions néfastes de certains, face à ceux qui défendent ce en quoi ils croient. C’est pour cela que Will réalise qu’il est un mauvais père, une fois que Danny risque de lui être retiré pour de bon.
L’action se cristallise ici autour d’un butin, d’une clé et d’une trahison, où les faux semblants sèment le trouble dans la nature des protagonistes, rarement unidimensionnels. Avec une formule absolument classique, Miller parvient à nous raconter une histoire simple et efficace, plutôt bien menée, sans multiplier les intrigues et les retournements de situation, comme dans ses œuvres précédentes.
Le cinéaste se contente d’un fil conducteur auquel il se tient et évite de tomber dans l’excès de générosité. Il épure au contraire son récit pour se concentrer sur la relation père/fils, et alimenter des scènes d’action par la mise au pied du mur de Will. Ce dernier doit composer avec la police locale, peu encline à le laisser sauver seul son fils. Se met alors en place un jeu de chat et de la souris, une structure amplement suffisante pour ce genre de divertissement.
Si la mise en scène de Steven C. Miller se présente plus claire et son histoire plus limpide, à noter que le casting s’avère pour le moins solide. Porté par un Hayden Christensen plutôt convaincant, avec son physique de jeune premier il se prête très bien à ce papa naze qui préfère la thune à l’épanouissement de son fils. Passe partout, le plonger dans l’horreur et la violence tranche avec ce qui peut être attendu d’un tel acteur. C’est là un point très positif pour le film.
Comme antagoniste principale, Gethin Anthony (Renly Baratheon dans « Game of Throne'') offre au kidnapper une véritable humanité, et permet de rendre crédible la relation qui naît avec Danny. Quant au reste du cast, il correspond à ce qu’on peut attendre de seconds rôles dans un B-movie. Ha oui, et il y a Bruce Willis aussi, qui interprète ici le chef de la police qui chasse Will. S’il fait un peu l’effort de jouer la comédie, il a quand même l’air très fatigué, et peine à insuffler la moindre étincelle à un personnage de fait très convenu. Bref…
Fidèle à son style, Steven C. Miller n’affiche pas la prétention de révolutionner quoi que ce soit et se contente de placer « First Kill » dans la continuité des actioners made in 80’s. Il n’est pas rare de déceler au détour d’un plan de caméra, d’un décor ou d’une réplique, une référence subtile à tout un pan de la pop culture cinématographique. En toute honnêteté et avec authenticité, par le biais d’une mise en scène solide, cette proposition de série B se montre efficace, jouissive, et généreuse en action. Elle se permet même le luxe de proposer une vraie histoire avec de vrais arcs narratifs, qui favorisent la nature dramatique de l’ensemble. À partir de là, il est difficile d’en demander plus.

-Stork._

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le 10 juil. 2021

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