Pour la première fois de sa (jeune) carrière, Damien Chazelle quitte la Terre pour s’élever au dessus de l’atmosphère, mais il n’en oublie pas son objectif principal : filmer l’homme derrière le scaphandre. Que ça soit pendant les séquences d’entraînement ou lors des vols dans l’espace, nous sommes toujours avec Neil Armstrong. Les plans serrés sur son visage anxieux, presque paniqué dans le vaisseau, la caméra tremblante et le bruitage sonore immersif nous donnent parfois l’impression d’être dans un documentaire. Ces séquences sont impressionnantes et témoignent de l’extrême dangerosité que représentait cette mission, au cours de laquelle un boulon mal serré pouvait transformer le vaisseau en cercueil. L’ombre de la mort plane d’ailleurs tout au long du film : du deuil impossible de l’enfant disparu, à cette mission qui aurait pu tourner au drame.
Du format pellicule 35mm destiné aux séquences sur Terre, Damien Chazelle passe à l’IMAX pour filmer l’espace et ainsi contraster avec le sentiment de claustrophobie propre au vaisseau spatial qui s’apparentait à l’époque à une boîte de sardines. Comme dans La La Land et Whiplash, Damien Chazelle construit son film crescendo jusqu’à atteindre un climax terrassant. Il s’agit dans ce cas des premiers pas sur la Lune, qui prennent alors une dimension émotionnelle immense. Aucun son n’émane de cette scène, si ce n’est la respiration de Neil Armstrong, seul élément qui le renvoie à son statut d’être humain au milieu de cette infinité silencieuse. Cet instant, qui fait partie de l’histoire de l’humanité mais qui au final n’appartient qu’à lui, est renforcé par le lever de Terre qui se reflète sur son casque, comme autant de souvenirs de cette vie passée remplie de sacrifices qui l’ont conduit à cette instant précis. D’universelle, cette séquence devient intime, et l’astronaute baisse sa visière pour laisser transparaître l’homme derrière.
First Man a été critiqué pour ne pas avoir montré la scène de Neil Armstrong plantant le drapeau américain sur le sol lunaire, mais nous comprenons après avoir vu le film que son intérêt est ailleurs. Au lieu du drapeau, c’est un bracelet que Neil Armstrong déposera sur l’astre, et la puissance émotionnelle que dégage cette séquence est bien plus intense que tous les drapeaux du monde.
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