Enfermée dans une agressivité vulgaire si bien maitrisée, dans une banlieue anglaise barbare et sans horizon, alcoolisée et en rébellion perpétuelle contre sa mère, les autres filles du quartier, sa petite sœur ou les tsiganes du coin, la vie de cette ado déscolarisée de 15 ans semble verrouillée dans son «aquarium» social et juvénile, à peine compensé par son empathie pour les animaux et sa passion pour la danse. Séduisant, sensible et agréable, le nouveau mec de sa mère lui inspire enfin propension au partage, envie de plaire et une forme de jubilation à concurrencer sa mère. De son côté l’habile jeu de l’homme à coups de sémantiques subtiles, d’actes ou de non-actes subliminaux, fascine la jeune fille, et seul le spectateur est mis en garde contre un jeu manifestement trouble.
Bien plus par les actes, les images, leurs acheminements et révélations, que par les dialogues volontairement pauvres par souci de réalisme, ce film dur et sensible épluche brique par brique les illusions d’une jeunesse désagrégée par les faits et par le constat de son propre comportement. Physiquement, émotionnellement et intellectuellement, il refaçonne les valeurs d’une ancienne enfant, les espoirs comme les haines d’une jeunesse perdue, par de brillantes trahisons, prises de conscience, applications acides de l’âge adulte, et par la remarquable prestation de la débutante Katie Jarvis et de l’excellent, comme d’hab, Michael Fassbender.