"Cours Forrest, cours !" Voici trois petits mots bien simples et vides de sens ainsi balancés, et pourtant ils résonnent dans bien des têtes, 21 ans après la sortie de cette épopée humaine signée Robert Zemeckis. Celui qui a réalisé Qui veut la peau de Roger Rabbit ? et la trilogie Retour vers le futur (entre autres), est aussi celui qui a donné naissance à Forrest Gump, un film réputé et ô combien estimé et estimable. Tom Hanks fêtant son anniversaire aujourd'hui, j'ai un bon prétexte pour revenir sur ce classique plein de drame et de poésie.
Forrest, c'est ce bonhomme simple d'esprit, nommé ainsi par sa mère en référence à son ancêtre Nathan Bedford Forrest, qui n'est autre que le fondateur du Ku Klux Klan, parce que "parfois, dans la vie, on fait des choses qui n'ont pas beaucoup de sens." Tout le prédestine à une vie entravée par ses capacités limitées, pourtant, malgré sa grande candeur, Forrest est plein de courage et de détermination, et il le montre dès son plus jeune âge. Cette simplicité n'est d'ailleurs pas un frein, au contraire, elle va le pousser à vivre de grandes choses tout au long de sa vie.
Assis sur notre siège, chaise, canapé ou qu'importe, nous écoutons le récit de ce petit bonhomme à la modestie plus que naturelle, qui contraste outrageusement avec la richesse de son histoire. Au fond, il n'y a de récit plus riche que celui de la vie d'un homme. Celle de Forrest est pleine d'embûches, mais aussi de volonté et de courage, et Zemeckis la transpose au cinéma avec une maestria déconcertante, non sans l'aide d'un Tom Hanks immense et terriblement touchant.
Se baser sur la "simple" histoire de la vie d'un homme permet de créer une proximité avec le spectateur. Il est davantage aisé de s'identifier à un tel personnage qu'à un super-héros doté de super-pouvoirs en tout genres. Même si Forrest est atteint d'un léger retard, cela ne le freine pas, au contraire, c'est un avantage tant pour lui, que pour le spectateur, qui découvre une nouvelle manière d'aborder le monde qui l'entoure. En effet, peu importe son âge, Forrest garde une âme d'enfant.
Sa candeur le rend vrai, il n'y a pas d'arrière-pensée derrière ses actions et ses émotions, simplement le reflet de son âme. Il réagit par instinct, il suit ses envies et s'élance perpétuellement vers de nouveaux horizons. Au fur et à mesure qu'il découvre le monde et vit des aventures, on est pris par cette même curiosité, cette même envie qui le guide tout au long du film. Il n'y a pas de limites à la détermination de Forrest, car il est étranger à cette idée, tout simplement. Pourtant, les épreuves qu'il traverse ne sont pas toutes simples à vivre, ni agréables à regarder, mais son état d'esprit, toujours un brin déconnecté de la "réalité", permet de s'en éloigner et de s'en détacher afin de ne pas avoir le cœur trop lourd.
J'insiste d'ailleurs sur les guillemets autour de "réalité". Car si Forrest vit l'Histoire avec un grand H, il nous la fait découvrir selon un regard bien différent du sens commun, affranchi de toutes déformations et interprétations. Forrest semble être dans sa bulle, inatteignable voire invincible, mais pourtant toujours ouvert aux autres. Il partage son histoire avec ceux qu'il rencontre autour de sa vie, mais il partage surtout avec nous, spectateurs. Son récit nous transmet son entrain naturel, il motive et est bourré d'optimisme, car Forrest ne se résigne jamais à la fatalité.
Forrest Gump est une leçon de vie, l'histoire extraordinaire d'un bonhomme ordinaire, mu par sa volonté et ses envies, profondément vrai dans ses dires et ses actions, preuve humaine que si l'esprit guide nos actes, il ne doit pas entraver les pulsions qui émanent de notre cœur. Mélodrame par excellence, Forrest Gump est plein de tristesse et de joie, un film complet, poétique et beau, qui marque, et qui nous apprend que "la vie, c'est comme une boîte de chocolats : on ne sait jamais sur quoi on va tomber."