Du haut de ses sept minutes, Foutaises reconstitue entièrement l'univers de Jeunet. Un court métrage ? Même pas peur !
On connaît tous Jeunet pour Le Fabuleux Destin d'Amélie Poulain, ou son Long Dimanche de Fiançailles, ou d'autres. Et c'est avec un plaisir inouï que l'on savoure ces sept minutes de légèreté, de pétillement. Notre cher réalisateur choisit Dominique Pinon en tant qu'acteur et narrateur. Et quel choix ! Un mètre vingt les bras levés, il est pourtant un géant du cinéma Français - pour ne pas dire du théâtre, car l'ayant vu sur les planches, il éclabousse d'énergie - à travers son dynamisme et ses expressions.
Ce court métrage représente tout ce qui est appréciable chez Jean-Pierre Jeunet: la tendresse et la subtilité. Il se concentre toujours sur le détail qui constitue sa patte, notamment pas sa candeur et son amour de l'innocence. On le remarque par exemple au début de Foutaises, lors du générique: un plan montre un panneau où est écrit "Découpage et montage : Jean-Pierre Jeunet". En dessous de celui-ci, un couteau de boucher est planté dans une planche à découper, clin d'œil au mot "découpage". On peut ne pas y prêter attention, mais celui qui le remarquera esquissera un sourire en coin. Et c'est ça, Jeunet ! Un assemblage de détails touchant, comme s'il voulait glisser un petit mot à chacun de son public.
L'ensemble se compose en noir et blanc, ce qui ajoute un brin de mélancolie et une photographie intéressante. En effet, Jeunet réalise de gros plans sur le visage de Pinon, tel le témoignage d'un grand enfant. Réalisé en 1989, Foutaises marque le début de ce réalisateur. Pourtant, la patte est bien assumée et travaillée. On retrouve des éléments que l'on a pu observer dans Amélie Poulain notamment, où l'ambiance Jeunet est, pour moi, la plus aboutie. Seulement, Amélie Poulain n'est arrivée qu'en 2001 ! Alors, Foutaises, film précurseur du cinéma de Jeunet ? Sept minutes de condensé. On retrouve avec nostalgie le fameux: "J'aime faire ceci, mais en revanche, je n'aime pas faire cela" en voix off, tel le début du Fabuleux Destin d'Amélie Poulain. On retrouve également le travail du son, qui est capital. Chaque phrase énoncée par le narrateur est ensuite imagée par une scène représentative, sans parole et souvent accompagnée du bruitage, mis en avant, et qui constitue finalement le détail croustillant que l'on a tous envie d'entendre.
Toujours émue au visionnage d'un film de ce réalisateur, je ne suis peut-être pas totalement objective, bien que je me trouve très convaincante…! Trêve de plaisanterie, Foutaises est une perle rare, où les plans courts se succèdent en évoquant chez le spectateur une émotion légère et grave à la fois. Chapeau bas, comme j'aime le dire !