Mention : Bluffant
Le film s'est d'abord jeté dans l'arène en mai 2014. Très remarqué à Cannes, il est reparti du festival avec le prix de la mise en scène. Dès les premières minutes de Foxcatcher, cette récompense se montre comme une évidence. Un sens inouï du détail et une maitrise totale de l'image. La photographie est magnifique. L'ombre et la lumière, les plans larges et les gros plans, le gris et le dorée, bref le contrôle des contrastes est sublime. Tout est parfaitement cadré, en plus d'être esthétique le décor nourrit le propos. Cette splendide mise en scène installe avec subtilité et netteté les éléments du récit. Ce qui accentue sa longueur.
Le parcours vécu par Mark Schultz est atypique, les relations avec son frère et son mentor sont singulières. Il est comme un renard à la fois déterminé et égaré, le frangin Dave est comme un chien de garde à l'affut et fidèle, son entraineur qui se revendique comme un aigle a plus des allures de vieux loup solitaire. John du Pont est vraiment fascinant. Riche de patrimoine mais pauvre d'amis et d'entourage. Sa passion pour la lutte ne semble qu'un prétexte pour entretenir une forme de vie sociale. Steve Carell est incroyable, il donne toute la dimension pathétique à ce rôle, une vraie performance. Mark Ruffalo aussi est méconnaissable. Frère et père de famille très en retrait, Dave Schultz se laisse finalement entrainer aux jeux.
Au fur et à mesure, Foxcatcher délasse la part tragique de son histoire. Avant d'atteindre ce chaos saisissant, les rounds s'accumulent et s'étendent. Et malgré cela le film ne manque pas de répit, bien au contraire. Le rythme lent sert à poser le récit avec précision mais traîne en longueur. Le chemin parcouru en un peu plus de deux heures aurait pu être aussi riche et progressif avec quinze ou vingt minutes de moins.
Cette longueur ce fait d'autant plus ressentir si on ne rentre pas complètement dans l'histoire. Ça m'est très personnel, mais c'est à peu près mon cas. Si Steve Carell dévoile un John Dupont fascinant et très intime, les deux frangins restent relativement obscurs. Channing Tatum et Mark Ruffalo sont pas mauvais du tout, mais comme certains point hermétiques du récit, les desseins de ces gars sont fins et enfouis. Le scénario n'en est pas moins maitrisé et constructif.
A travers une mise en scène éblouissante et pleine de génie (l'une des plus marquantes de ces dernières années), Bennett Miller raconte avec la manière une sombre aventure. Celle de trois types confrontés à leur propre désarroi et à un combat intérieur.
Note : 14 / 20