2012 fut, malgré de bonnes petites oeuvres une année assez fade, les films phares ne se révélant pas aussi bons que je l'aurais espéré, et je ne parle même pas des blockbusters (heureusement que Sam Mendes était là pour relever le niveau).
Mais cette année est morte, place à 2013 (oui je sais, mais cette critique date)! Et L'année commence je dois dire de la meilleure manière qui soit avec Foxfire. C'est bien simple, on tient peut-être déjà le prétendant au meilleur film 2013 (et à part le Dumont, je ne vois pas qui pourrait le dépasser) (j'avais oublié le kechiche, mea culpa).
Au-delà même de l'histoire, le film est techniquement impeccable. La mise en scène à caméra flottante pourrait rebuter, mais pas du tout; les plans sont géniaux, précis. On a vraiment l'impression d'être proche de ce groupe de filles, c'est une mise en images très intelligente. Et la photo ne gâche rien, au contraire, j'ai été très agréablement surpris, elle est vraiment magnifique.
Mais tout ça ne serait rien sans un scénario digne de ce nom. C'est bien mieux pensé qu'un simple film féministe très simplet, parce que ce n'est pas le but de Cantet ici. Non, les filles sont loin d'être des modèles. Elles sont iconoclastes, agissent parfois sans réfléchir et on ne peut que contester certaines de leurs actions. Mais en même temps on ne peut totalement les blâmer, et Cantet ne le fait pas, après tout elles ne font que se défendre. J'aime beaucoup ce petit jeu sur l'ambiguïté, ça donne de l'intérêt au film.
La grande force et ce qui marque, c'est que le film est beau, assez inexplicablement beau et nostalgique. A un moment, la narratrice ne sait plus quoi écrire sur la vie du gang des Foxfires dans leur "journal de bord", et c'est une attitude qui apparaît complètement naturelle. Il y a aussi un moment très malin (dans le bon sens du terme), celui où elle avoue elle-même ne plus se souvenir si telle ou telle personne était présente lorsqu'elle est partie du gang, c'est quelque chose de compréhensible parce qu'on ne peut se souvenir de tous les détails inscrits dans notre mémoire (surtout moi et ma mémoire de poisson rouge). Tout ça transpire des émotions vraies et nostalgiques.
Bon après le seul petit défaut que je pourrais peut-être reprocher c'est la longueur du film. Car à la moitié du film l'intérêt diminue quelque peu. Mais je chipote vraiment parce que l'histoire de ces filles reste passionnante. Et puis comment ne pas s'attacher à ces personnages un peu perdus au fond? Ce sont justes des filles en manque d'affection. Il y a malgré tout quelque chose de triste là-dedans quelque part. Contrebalancé par des scènes d'une tendresse absolue, je pense surtout au tout début du film quand une des filles s'infiltre dans la chambre d'une autre (Legs je crois). En parlant de Legs, ce personnage est magnifique. Mignonne et assez inquiétante à la fois, surtout vers la fin où les filles se mettent à déconner grave. J'aime beaucoup cette partie où elle attirent des mecs pour leur piquer leur pognon et vivre tranquillement dans leur maison, retirées de tout (qui n'a jamais rêvé de le faire?). Ce qui va bien sûr leur causer de sacrés ennuis.
Je crois que la meilleure scène du film est celle où elle enlèvent un gars pour lui faire cracher des millions, un gars à qui elle se sont attaché puisqu'elles bossent pour lui, et que celui-ci dit à Legs qu'elles vont avoir des ennuis. C'est vraiment inquiétant. Et les jeunes actrices sont fabuleuses, je ne sais pas comment des actrices non professionnelles peuvent accomplir un tel miracle (bon si en fait, Cantet les dirige bien). Un délice de direction d'acteurs, certains feraient bien d'en prendre de la graine. Legs est particulièrement belle, elle a des yeux que toutes les jeunes filles peuvent lui envier. On aura beau me rétorquer qu'il ne se passe rien, que c'est trop long et bla bla bla, je ne peux que rester fasciné par ce qui se passe sur l'écran.
2013 pourra être aussi décevante qu'elle voudra (pour l'instant c'est pas vraiment le cas, si on excepte bien sûr l'habituelle fournée de films à oscars), elle ne pouvait mieux commencer. Je crois que je vair me ruer sur entre les murs très prochainement, ça ne pourra être que du bon (notez que je ne l'ai toujours pas vu).
Pour finir, j'aimerais parler du dernier plan du film. Non seulement il fait écho au début, mais il est indépendamment du reste magistral. D'une joie et d'une tendresse folle.