"Il vit ! Il vit !".

En réalité, ce film de légende, entré dans l’inconscient collectif, n’est pas si réussi que cela, et je crois que les critiques de l'époque l'ont vraiment trop surestimé. C'est en tout cas ce que l'on peut se dire si on se donne la peine de le visionner aujourd'hui.

Ce film américain de James Whale n’est pas la première adaptation du roman épistolaire de Mary Shelley, un premier film (court et muet) avait été réalisé en 1910, mais c’est bien l’œuvre de Whale qui a rendu le monstre célèbre à travers le monde, et c’est sans doute la raison pour laquelle on retrouve cette production dans certaines listes des plus grands chefs d’œuvres du cinéma.

Le film n’est pas exceptionnel, je dirais tout juste passable. Bien sûr, j’ai relevé quelques scènes qui sortent du lot, mais dans l’ensemble, elle sonne toute faux. Le pire vient des séquences de romance, notamment dans les dialogues dignes d’un Soap Opera comme « Les Feux de l’Amour » (ça m’a véritablement fait penser à cela). Il y a aussi quelque chose de très ringard dans l’attitude des acteurs, des manières exagérées qui nous retirent toute empathie pour eux. Les scènes horrifiques ne le sont pas. Le monstre n’est pas effrayant, et ce malgré la bonne volonté de Boris Karloff, qui finalement se révèle être le seul acteur satisfaisant de la production.

L’histoire, de la manière dont elle est mise en scène, n’est pas crédible une seule seconde. Je laisse de côté la séquence de l’expérience, durant laquelle le monstre prend vie, car elle relève du fantastique, et avec un peu d’imagination on pourrait faire l’effort d’y croire. Mais je m’intéresse surtout à tout ce qui déroule après cet événement déclencheur, et chaque action est laborieuse et incompréhensible. On se demande toujours pourquoi les personnages agissent de façon aussi stupide. Le docteur Waldman qui observe son collègue sombrer dans la folie sans tenter de l'empêcher de réaliser son expérience délurée... Pourquoi ? Fritz qui martyrise le monstre sans raison... Pourquoi tant de méchanceté ? Elizabeth qui n’est jamais dégoutée dans son amour par les ambitions mégalomanes de Frankeinstein... Comment ? Le professeur Frankeinstein qui décide de se marier alors que son monstre lui a échappé... (Ce n’est pas comme s’il y avait d’autres priorités… hein) Franchement, c'est si bête. Il enferme sa future épouse contre sa volonté dans sa chambre, alors qu’il vient de lui promettre de la protégée, en apprenant que le monstre sème la terreur dans la ville. Mais pourquoi fait-il ça ? C’est complètement con... Bref, les scènes idiotes comme celles-ci, où il semblerait que les personnages n’ont pas de conscience et de jugeote, s’enchainent et ne s'interrompent pas. Ajouté à cela la manière extrêmement convenue qu'ont les événements dans leur déroulement. Je crois que le film est un exemple parfait de ce qu'il ne faut pas faire pour tuer le suspens. Enfin, la conclusion de l'histoire (je parle de la toute dernière scène) est pour moi incompréhensible, parfaitement ratée, sans saveur et inutile.

D'un point de vue technique, les décors ont l’air d’être en carton, ils ne trompent personne. L’ambiance du film n’est pas vraiment subtile. Les dialogues ne sont pas recherchés et n’ont aucune profondeur. Tout cela est plutôt très mauvais.

Vous l’avez compris, le film ne m’a pas convaincu. Reste que certaines scènes méritent le coup d’œil. L’intérêt du film réside dans le fait que le monstre n’est pas là où on l’attend. Le professeur Frankenstein qui est le véritable monstre de l’histoire, se prend pour Dieu et créait la vie. Le monstre, quant à lui, effraie par son apparence, mais se révèle en réalité être un individu ignorant, comme un nouveau-né, et c’est la curiosité, l’insouciance et l’envie d’apprendre qui lui font commettre des actes odieux, tout comme un enfant qui s'amuserait à arracher les pattes d'une fourmi. Cette impression est plutôt bien exposée dans certaines séquences, celle de sa rencontre avec la petite fille, qui est pour moi la véritable scène effrayante et épouvantable de l’œuvre. La scène du père qui traverse la foule en liesse avec sa défunte fille dans les bras est aussi effroyable que réussie.

Peu importe ce que j’en dirais, « Frankenstein » reste un film culte et emblématique du cinéma d’époque, sans doute pour sa plongée dans l’horreur et la science-fiction, mais certainement pas pour ses qualités techniques et narratives.