Le Britannique Bernard Rose réalisateur du traumatisant «Candyman» et du troublant «Paperhouse» s'approprie le roman de sa compatriote Mary Shelley et le transpose à Los Angeles de nos jours. La force de cette grande romancière du XVIIe siècle est d'avoir su écrire une oeuvre intemporelle, même visionnaire au regard de cette adaptation moderne. L'errance de sa créature se confond, voire se confronte à celle des laissés-pour-compte dans une ville tentaculaire qui n'est qu'une immense décharge à ciel ouvert. L'oeuvre de Mary Shelley trouve un second souffle au coeur d'une Amérique où le fossé social se creuse inexorablement. Loin des morceaux de corps recousus à la hâte, loin des décharges électriques insufflées par un «apprenti sorcier», aujourd'hui, le créateur, Victor Frankenstein (Danny Huston) au même titre qu'Eldon Tyrell dans «Blade Runner» est un généticien renommé, un pseudo-dieu, profanant la vie en injectant un peu d'humanité dans le corps d'un innocent, sans apprentissage émotionnel, puis en l'abandonnant à un sort plus que funeste. Excellente version que ce Frankenstein moderne, dont la narration à la première personne rappelle le roman. Cette relecture moderne se paye même le luxe d'un final d'une poésie lyrique absolument magnifique. Seul bémol, trop de scènes gores qui, même si elles soulignent la dureté de l'époque actuelle, n'étaient pas nécessaires.