Cette critique contient des spoilers mais en même temps je vois pas pourquoi quelqu'un qui n'a pas vu le film la lirait alors que c'est le septième opus d'une saga donc est-ce bien utile de prévenir...
Freddy sort de la nuit est un projet atypique. Pour ce septième opus de la saga sur l'homme brûlé aux griffes. Wes Craven revient derrière la caméra avec une idée inédite : et si Freddy était réel et qu'il pouvait sortir dans la fausse vraie vie ? (cette phrase n'a aucun sens). Plus simplement, et si Freddy n'était pas juste le grand méchant d'une série de films d'horreur mais une vraie entité maléfique pouvant tuer de "vraies" personnes et notamment s'attaquer à ceux qui ont travaillé sur le tout premier opus de la saga, Nightmare on Elm Street ?
Ce film est intriguant car il peut tout à fait être considéré comme la suite directe du reste de la saga sans qu'il n'y ait pour autant véritablement besoin d'avoir vu les précédents films pour comprendre celui-là. Et en même temps, c'est l'opus qui ressemble le moins à la saga Freddy alors que c'est celui qui en parle le plus. Ce n'est pas la première fois que Wes Craven nous fait le coup puisque l'histoire qu'il avait écrite pour le troisième épisode était déjà une suite directe du premier volet qui ignorait gentiment les événements du deuxième opus sans pour autant complètement les exclure. On se retrouve donc avec un nouveau film sur et avec Freddy Krueger mais au statut un peu particulier.
Ce film met en scène Heather Langenkamp (actrice principale dans Les Griffes de la nuit), Robert Englund (Freddy), Wes Craven et d'autres dans leur propre rôle. Cette façon qu'à le cinéaste américain de briser le quatrième mur tout en en construisant un cinquième est à la fois amusante et intelligente car il trouve ainsi l'idée de donner un nouveau souffle à la saga qu'on croyait définitivement enterrée après le catastrophique sixième épisode. En donnant cette nouvelle dimension à la franchise, Craven trouve le moyen de raconter une nouvelle histoire sur sa créature sans répéter les films précédents. Il en profite également pour moderniser un peu le personnage, changeant légèrement son aspect et lui redonnant son côté horrifique qu'il avait progressivement perdu au fil des épisodes de la saga pour presque devenir comique. Wes Craven se réapproprie donc le personnage et toute la saga par la même occasion. C'est bien trouvé et les connaisseurs s'amuseront de voir Robert Englund et le réalisateur de La colline a des yeux dans leur propre rôle.
Ce côté méta de ce septième volet est également un avant-goût de ce que fera Wes Craven avec Scream deux années plus tard. Sa façon de déconstruire le film d'horreur pour ensuite mieux le reconstruire est inhabituelle mais complètement nouveau pour l'époque et il en fera presque sa marque de fabrique après avec la saga Scream dans laquelle il s'amusera là encore à tordre les codes du cinéma d'horreur et plus précisément des slashers. C'est encore plus surprenant ici car à la fin de ce septième opus, Heather Langenkamp finit par reprendre son rôle de Nancy du premier film et redevient le personnage du film dans le film et lit directement les pages du script du film. Wes Craven semble adorer jouer avec les règles. Ici, les limites entre les films sont floues. C'est assez novateur et rafraîchissant après six épisodes qui finissaient par être répétitifs.
Cependant, malgré ses bonnes idées et sa tentative de renouveler la saga, Wes Craven finit inévitablement par retomber dans un format plus habituel et il accumule ainsi dans son long-métrage les défauts d'un slasher classique. Les acteurs ne sont pas forcément au top. Il y a des incohérences car évidemment à force de jouer avec les codes on s'embrouille. Et l'histoire devient de moins en moins captivante et fur et à mesure qu'elle se transforme en film d'horreur traditionnel. Jusqu'à se terminer en un final terriblement classique où le grand méchant à des dizaines d'opportunités de tuer les personnages mais ne le fait pas parce que sinon le film n'aurait pas fin heureuse. Le film commençait pourtant bien avec son idée assez novatrice mais il finit par ressembler à un film d'horreur classique, qui ne fait pas peur, qui ne surprend pas et qui perd au final ce qui faisait sa force au début.
On ne pourra pas retirer à Wes Craven sa volonté de tenter quelque chose de nouveau avec ce film. C'était un pari risqué mais il y avait de l'idée. Mais la mise en pratique de cette idée ne tient pas la route jusqu'au bout. Pour certains, ce film restera comme l'épisode bizarre de la saga. Pour d'autre, il sera avant tout la création d'un artiste qui a voulu jouer au cinéma avec du cinéma. Il y a des ratés, son oeuvre n'est globalement pas une réussite, mais on appréciera le courage et l'imagination de cet artiste.