Friedkin : "J’aimerai avoir Paul Newman pour le rôle principal."
Son producteur : "Ecoute bonhomme, Paul Newman vaut le budget du film donc laisse tomber."
Friedkin : "Bon tant pis. On va faire avec Gene Hackman même si je ne suis pas persuadé de son talent. Sinon pour le rôle du méchant j’aimerai bien avoir Francisco Rabal. Je suis un fan de cet acteur."
Son producteur : "Ça tombe bien je vais passer mes vacances en Europe. A mon retour je te l’amènerai."
Quelques jours plus tard,
Friedkin : "Heu…ce n’est pas Francisco Rabal lui. C’est Fernando Rey."
Son producteur : "Tu es sûr ? Bon trop tard maintenant, le contrat est signé et je l’ai ramené dans mes bagages."
Cette introduction (dont j’ai pris quelques libertés dans les petits détails), sert surtout à mettre en évidence qu’il faut parfois composer selon les imprévus et les moyens que l’on a. Et c’est peut être dans ce genre de situation qu’on y décèle le véritable talent.
Car que serait French Connection sans la rage expressive de Gene Hackman, sans la classe naturelle de Fernando Rey ?
L’attribution des rôles voulus par Friedkin aurait inversé la personnalité du flic (Paul Newman à un physique élégant) et du truand (Francisco Rabal à un physique dur). Ce qui fait que la frontière bien/mal, atout majeur dans la filmographie de Friedkin, aurait été bien moins ambigüe.
Ce qui fait également la force de French Connection est son côté "fauché", caméra à l’épaule, au plus proche de l’action. On est en totale immersion avec les 2 policiers. Friedkin a au préalable suivi de vrais policiers pour s’inspirer de leurs méthodes.
Le montage est primordial dans ce film et deviendra une référence dans le cinéma d’action (chaque coupe débute et se termine au moment le plus intense). Il n’y a aucun temps mort. La plus grande preuve de la perfection dans cet exercice est certainement la course poursuite au milieu du film. Professeur Friedkin explique que pour faire une bonne scène de course poursuite il faut 4 éléments :
- Un cadrage sur l’environnement de la poursuite.
- Un cadrage sur le conducteur.
- Un cadrage sur la vision du conducteur.
- Un cadrage sur le (ou les) véhicule(s).
Ensuite, tout est une question de montage et de raccords.
En conclusion, tous les ingrédients sont présents pour faire de French Connection LE film policier par excellence.
ps n°1 : Merci à Jean-Baptiste Thoret pour ses nombreuses anecdotes autour de ce film.
ps n°2 : La même année, une autre perle dans le domaine du montage arrivera sous la coupe d’un jeune réalisateur dénommé Spielberg : Duel (je ne pouvais pas ne pas le citer !).
ps n°3 : vous avez aimé la course poursuite de French Connection ? Vous allez adorer celle de Police Fédérale Los Angeles !