Enlisement dans la poudreuse
L’idée de faire une suite à French Connection n’est a priori pas foncièrement malhonnête. Le caractère réaliste du premier opus et sa lucidité quant à l’efficacité réduite de l’action policière peut justifier qu’on poursuive la quête.
L’idée de faire venir Popeye à Marseille et de jouer la fracture des nationalités peut sembler intéressante. Voir Hackman partager le plan avec Castaldi ou Léotard a quelque chose d’assez farcesque, et ce n’est pas l’ouverture sur le poisson d’avril qui viendra atténuer cette impression.
Reconnaissons à Frankenheimer la volonté de poursuivre avec l’esthétique de son (illustre et ô combien supérieur) prédécesseur, par des caméras à l’épaule, des zooms nerveux et une tonalité assez naturaliste. Popeye est toujours aussi détestable (Hackman se donne sans compter), voire davantage, ce qui est aussi à mettre au compte des qualités du film. La poursuite finale décline celle du précédent par une variante trolley/course à pied qui n’est pas honteuse non plus.
Il n’en demeure pas moins que le film fait sacrément dans la redite et n’apporte pas grand-chose de nouveau, si ce n’est le fait de voir les méthodes radicales de Popeye appliquées avec fracas au pays du camembert et de la bouillabaisse. Cela vire d’ailleurs au systématisme un peu lourd, et le pauvre a le don d’entrainer à sa suite des morts de collègues ou d’indics chaque fois qu’il sort de chez lui.
Le vrai souci réside dans le rythme. Le film, de deux heures, s’attarde beaucoup trop longuement sur certains aspects : les difficultés de Popeye à communiquer, sa détention où on le drogue de force, sa désintox… On voit bien où le réalisateur veut en venir, à savoir renforcer l’épaisseur de ses personnages et leur relation houleuse. Mais ça ne fonctionne pas, c’est interminable, poussif et sans intérêt pour la dynamique générale.
French Connection II n’est pas un ratage complet, et respecte assez fidèlement le cahier des charges posé par le fondateur opus précédent. Il lui manque une singularité et un sens du rythme pour en faire un film qui, sans son prédécesseur, s’oublierait très facilement.