Évidemment, comment ne pas comparer au Labyrinthe du silence, sorti en 2014 ?
Et il faut dire que Fritz Bauer souffre de la comparaison. Là où Le Labyrinthe (du silence, hein, on aura bien compris que je ne pense pas aux deux films déjà sortis où des adolescents se débattent dans une post-apo d'adolescents) restait très classique, avec notamment des personnages féminins foncièrement inutile, mais relativement efficace, Fritz Bauer réalise l'exploit d'être encore moins subtil et d'être à moitié décousu.
Dès le début, on a l'impression de commencer par la fin. Le personnage principal a-t-il tenté de se suicider? Est-ce-qu'il a juste des problèmes de narcolepsie (dans son bain? Pas de chance...) ?
On ne s'attardera pas là-dessus. Finalement, ce début fracassant ne sert guère qu'à introduire les vilains méchants (des anciens nazis qui travaillent désormais à la justice - certes, réaliste, mais je reviendrai plus tard sur la subtilité incroyable des antagonistes), qui n'auraient visiblement pas de problème à voir disparaître le gentil procureur.
Les scènes se succèdent, certaines sans aucun lien (Eichmann, d'un coup, en Argentine - et je sais que c'est l'Argentine grâce au filtre qui rend toute l'image jaunâtre), comme si on se moquait totalement de mener le spectateur, tiens, tu savais à quoi t'attendre, débrouilles-toi.
Bon, par contre, pour les méchants, on est guidés. Je ne nie absolument pas le caractère "méchant" d'anciens nazis, difficile de protester là-dessus, mais enfin, était-il besoin de les faire discuter entre eux dans des pièces sombres en s'exprimant sur la possibilité de voir disparaître le procureur, à l'aide de phrases pour le moins équivoques dans le style "il serait bien fâcheux qu'il lui arrive quelquechose, huhuhu" (n'oublions bien sûr pas les ricanements et les sourires carnassiers. Très importants, ça).
Remarquez, ils ne se retiennent pas d'avoir cette attitude hyper louche auprès de leurs collègues. On repassera pour le profil bas. Bref, des méchants pathétiques, et qui adorent débarquer au moment inopportun pour prendre le gentil sur le fait et le faire chanter.


J'en viens à la deuxième moitié du scénario : il se trouve que les relations homosexuelles sont, à l'époque, toujours condamnées par la loi en Allemagne. C'était intéressant d'en parler, pour revenir sur le renforcement de ces lois sous le IIIe Reich et le fait que ce renforcement n'ait toujours pas été supprimé...
Mais finalement, on en vient à suivre un personnage qui passe de son mariage à sa gentille femme (LE personnage féminin) qui ne pense qu'à sa nouvelle cuisine et ses futurs bambins, à une aventure avec un travesti dans un club louche. Comme ça, en à peine deux heures, c'était rapide.


Ne reste en gros qu'un truc à peu près sauvable : le personnage principal, très bien interprété. Mais il me faisait penser à quelqu'un que je connaissais, alors ça me faisait vraiment trop bizarre.


Bref, je vous conseille de regarder le Labyrinthe du silence, mieux réalisé et pas beaucoup moins subtil.


Ah oui, et enfin, c'est quoi cette manie de sous-titrer les films allemands avec un truc commençant par "un héros...". On avait déjà eu Elser, un héros ordinaire... ça fait mieux vendre?

ElCaracol
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le 3 avr. 2016

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