On oublie la catégorisation hâtive en thriller pour garder à l'esprit qu'il s'agit bien là d'un drame social. Ensuite, on réévalue l'ensemble des scènes de ce bon film, féministe: oui; original: oui; mesuré: oui, aussi. La rivière gelée, c'est la figure idiomatique du film, à la fois espace d'échange (s), de trafics, échanges entre personnes, échange de personnes contre de l'argent, territoire de la clandestinité, zone de passage, zone de froideur aussi et de débâcle possible. Le fleuve est là, renvoyant au symbolisme, aux fleuves des mythes. Médium gelé qui dit quelque chose du surplace (de l'embourbement ?) social de l'Amérique du nord : on le franchit, on prend le risque... On se frotte à la justice des USA mais on est aussi dans une région tribale à part (le territoire des Mohawks) avec ses propres lois, ses propres frontières, sa propre histoire, ses naufragés. Le médium gelé, les allers/retours de passeurs de clandestins, c'est aussi des petits cailloux allégoriques semés tout au long du film à propos du libre échange, du libéralisme, de ses naufragés une fois encore. On se dit que l'on vient de voir des trajectoires de vie qui flirtent avec la catastrophe. On se dit qu'il s'agit effectivement d'un drame et surtout d'un bon film.