Miller ne sait pas ce qu'il raconte

À la sortie de Fury Road, George Miller avait déclaré travailler sur un prochaine Mad Max intitulé The Wasteland.

Au final, nous avons eu ce Furiosa.

Si l'anecdote peut paraître secondaire, je trouve qu'elle impacte le film car on sent bien que Miller a deux projets ici : approfondir son univers, développer le lore et raconter l'histoire de Furiosa.

Sauf que ça ne fonctionne vraiment pas pour plusieurs raisons :

La mise en scène graphique de Miller est beaucoup plus adaptée au format conte (comme dans Trois milles ans à t'attendre) car elle met naturellement en valeur le potentiel allégorique de ce genre de récit. Cependant, elle est bien moins propice à mettre en scène l'historicité d'un univers.

On a donc toujours l'impression que Miller survole tout son récit à l'aide de plans évocateurs certes mais elliptiques.

Je pense à cette scène bizarre où on te parle des guerres de l'histoire de l'humanité pour aboutir celle entre Immortan Joe et Dementus....Pour au final évacuer la guerre en deux-trois plans....C'est habituellement le genre de scène qui sert d'ouverture à un film pour introduire un contexte. Là, elle apparait au bout de 2h de film puis plus rien. On passe à la vengeance de Furiosa.

Vengeance qui ne semble vraiment faire le cœur du film que dans sa dernière demi heure. Même si elle traverse toute l'histoire, le fait que Furiosa soit muette, que Miller fasse des aller-retours entre son personnage et son univers n'aide vraiment pas à lui donner une réelle ampleur.

Fury Road s'est montré bien plus efficace par la simplicité de l'histoire. Telles les tragédies grecques, elle contenait une unité de temps, de lieu et d'action (tout se passe presque dans le désert en 1 jours) offrant ainsi plus de lisibilité dans les enjeux, et la narration, toujours à la hauteur de ses personnages, finissait par donner beaucoup plus d'ampleur dramatique et rendait les scènes d'actions plus prenantes.

Ici, les scènes d'actions, qui manquent vraiment d'enjeux je trouve, en sont réduits à ce qui fait la particularité du cinéma d'action de Miller : à de simple représentation, un numéro de spectacle (l'allusion au cirque dans certaines critiques de Fury Road n'est pas anodine), certes pas déplaisant mais un peu vain.

Au mutisme de Furiosa, Miller oppose le loquace Dementus, énième ersatz du Joker de part sa folie théâtrale et son goût pour le chaos, le cabotinage de Chris Hemsworth finissant de le rendre pesant à la longue.

Après Fury Road qui était pure geste de cinéma d'action, ce Furiosa est une déception.