Gambler
7.2
Gambler

Documentaire de Phie Ambo (2006)

Je me souviens avoir vu un des docu consacrés à Refn, mais je ne sais plus si c'est "Gambler" ou "NWR". Soit, j'ai lancé celui-ci sans jamais avoir d'impression de déjà-vu.


Je m'attendais à ce que ce soit bien mais ça ne l'était pas. Pourtant le sujet est intéressant, puisque ça parle de Refn, ce réalisateur un peu fou, comme beaucoup d'autres réalisateurs, qui tente de payer ses dettes en se lançant dans les deux suites de Pusher. Un premier pour éponger les dettes, un troisième pour toucher un peu d'argent. Cela me fait un peu penser à Coppola qui avait été contraint de faire des suites à "The Godfather".


Dans ce docu, beaucoup de points intéressants sont soulevés, mais aucun n'est vraiment approfondi. Par exemple, j'aurais bien voulu voir comment Refn et ses producteurs gèrent l'argent pour réaliser ses deux suites. Je veux dire en détail ! Pas juste le laisser dire qu'il va foncer tête baisser avec tel budget en espérant récolter telle somme. On assiste un peu à la fabrication du film lors de la phase écriture, mais ça n'est jamais très passionnant. Quant à la production même, c'est complètement ellipsé. Si on se rend compte de la difficulté que rencontre Refn, c'est uniquement parce qu'on le film en train de geindre, procédé facile répété à maintes reprises. Heureusement, entre deux plaintes, il parvient à garder un peu d'espoir, mais on est tout de même à un cheveu du misérabilisme puant.


Les tracas du couple sont une autre piste à peine explorée. Parce qu'on imagine bien que la vie de famille ne doit pas être évidente non plus quand on vit dans le rouge pendant deux ans. Evidemment là aussi on aurait pu tomber facilement dans l'écueil larmoyant, mais il y avait moyen de montrer simplement comment ils s'en sortent chaque semaine, le genre de petit sacrifice qu'ils font. Les seules fois où on montre la famille, c'est aussi pour en faire un portrait uni dans l'adversité. Tout cela manque un peu d'épaisseur, d'approfondissement.


Le réalisateur aborde également la question de l'artiste par rapport à un projet commercial. Refn le répète : il veut faire son film pour le fric, mais il ne veut pas se vendre non plus, il veut conserver son point de vue artistique, offrir quelque chose de réellement mieux que dans le premier film. Il ne veut pas juste revenir en arrière. C'est aussi quelque chose qui aurait été intéressant de suivre, tout le processus créatif, surtout que Refn déclare à un moment que ce sont des gens qui le passionnent : il a forcément dû se documenter, faire des recherches... pourquoi on ne ressent pas tout ça ? Et s'il n'a pas fait les recherches (ce que je soupçonne), pourquoi ne pas en parler aussi ?


C'est intéressant aussi de constater que ce documentaire est un peu une suite des films : Refn endetté, qui doit trouver autant d'argent en peu de temps, ça fait forcément penser aux personnages principaux de la trilogie. Mais au final, on ne ressent pas vraiment cette quête d'argent. C'est un peu normal, chercher du fric quand on deale, c'est différent que lorsqu'on cherche du fric pour produire un film : il ne s'agit pas d'aller chercher un pactole, non, on parle de virement bancaire. N'empêche que ça aurait pu être raconté de manière un peu plus dynamique. Parce qu'au final, si les chiffres cités impressionnent, c'est parce qu'ils sont dits, par parce qu'on ressent le combat du réalisateur au travers d'une trame dramaturgique bien construite.


Il y a aussi plusieurs passages où on ne comprend plus ce qu'il se passe. Le réalisateur le dit lui-même : les comptables-juristes ont essayé de lui expliquer ce qui n'allait pas, Refn n'a rien pigé, il est incapable de l'expliquer à la caméra. On doit donc se contenter de la conclusion : Refn doit à nouveau de l'argent de sa propre poche et non plus au travers de sa société. Il y a d'autres passages de ce genre où on aurait bien voulu que ce soit le réalisateur du docu qui fasse son investigation plutôt que de laisser Refn tout dire frontalement : c'est tellement paresseux !


Paresseux c'est le bon mot. Il y a beaucoup de passages où il ne se passe pas grand chose, où Refn répète les mêmes choses, où on assiste à des petits moments pas particulièrement utile à l'histoire qui nous est racontée, qui sont là juste pour amener une émotion un peu facile. Je suis aussi de cette tentative de suspense dont le film dépend beaucoup : si on ne connaît pas le réalisateur ni la trilogie, ça peut fonctionner, mais quand on sait que les films ont suffisamment marché pour que le réalisateur puisse mener sa carrière Hollywoodienne, tout ce suspens perd de son intérêt. Et comme le film est au final très pauvre, que tous les points intéressants ne sont exploités que superficiellement, ben il ne reste pas grand chose à manger.


Bref, assez déçu par ce "Gambler". On ne s'emmerde pas, ça fait son petit effet, mais le réalisateur aurait pu aller tellement plus loin, il abandonne tellement de pistes intéressantes qu'on ne peut que rester sur sa faim à la sortie du film. Le pire, c'est que c'est pour dresser un portrait, somme toute, assez lisse du réalisateur là où on aurait pu être plus cruel. J'espère que les deux autres docu sont un peu plus 'osés' à ce niveau-là (le dernier devrait l'être si j'ai bien compris le pitch).

Fatpooper
5
Écrit par

Créée

le 22 mai 2016

Critique lue 360 fois

Fatpooper

Écrit par

Critique lue 360 fois

D'autres avis sur Gambler

Gambler
Pascoul_Relléguic
9

Critique de Gambler par Pascoul Relléguic

Le documentaire Gambler est présent dans le coffret Pusher. Je l'ai vraiment trouvé excellent, tant on vit les évènements et la tension qui en résulte aux côtés de Refn. Au bord de la faillite...

le 26 août 2020

1 j'aime

Gambler
languedepute
8

Critique de Gambler par languedepute

Filmer ou mourir ! Récit d'un génie qui vit pour son art. Et Dieu merci, NWR ne baissera jamais les bras.

le 14 juil. 2018

Gambler
Fatpooper
5

Stay true

Je me souviens avoir vu un des docu consacrés à Refn, mais je ne sais plus si c'est "Gambler" ou "NWR". Soit, j'ai lancé celui-ci sans jamais avoir d'impression de déjà-vu. Je m'attendais à ce que ce...

le 22 mai 2016

Du même critique

Les 8 Salopards
Fatpooper
5

Django in White Hell

Quand je me lance dans un film de plus de 2h20 sans compter le générique de fin, je crains de subir le syndrome de Stockholm cinématographique. En effet, lorsqu'un réalisateur retient en otage son...

le 3 janv. 2016

122 j'aime

35

Strip-Tease
Fatpooper
10

Parfois je ris, mais j'ai envie de pleurer

Quand j'étais gosse, je me souviens que je tombais souvent sur l'émission. Enfin au moins une fois par semaine. Sauf que j'étais p'tit et je m'imaginais une série de docu chiants et misérabilistes...

le 22 févr. 2014

121 j'aime

45

Taxi Driver
Fatpooper
5

Critique de Taxi Driver par Fatpooper

La première fois que j'ai vu ce film, j'avais 17ans et je n'avais pas accroché. C'était trop lent et surtout j'étais déçu que le mowhak de Travis n'apparaisse que 10 mn avant la fin. J'avoue...

le 16 janv. 2011

108 j'aime

55