Une fresque épique, une virtuosité scénaristique, musicale, picturale et une main de maître dans la direction d'acteur. L'équation de la méthode Scorsese, comment donner un souffle épique et magistral à la fondation d'une psychologie et d'une humanité typique de la vie américaine.
Faire du cinéma n'est pas à la portée de tout le monde et dans ce constat Scorsese donne un sentiment d'amertume à tous les cinéastes en herbe. Cependant l'essence de son cinéma est quelque chose de profondément épique, réaliste, fantastique et sur dimensionné. Tout ses films respirent la grandiloquence et le paroxysme du déchainement, de l'excentricité et de du grandiose. Donner un souffle épique à de vulgaires combats de rues. Donner une consistance à des personnages tous détestables dans leurs recherches de la reconnaissance. Gangs of New York est marqué par l'héroïsation de la vulgarité et de la bassesse. Mais Scorsese en est le dieu. Mettre en lumière et grandir les malfrats, les canailles, les mafieux, les menteurs et les traitres. Picturaliser la mort et la violence, le sang et la boue. Donner un souffle poétiquement épique est sa spécialité, son oeuvre. Montrer que leur humanité n'est qu'un reflet de la notre, nos erreurs, nos désirs et notre lutte ne sont que vulgaire futilité qui dans un schéma omniscient révèle le souffle historique, héroïque et sensationnel de l'existence humaine, quel que soit le combat et sa portée, la lutte c'est l'histoire de l'homme, c'est le cinéma de Scorsese.
Cette histoire au souffle si épique se déroule dans le New York de la fin du 19 ème, lors de l'immigration massive des populations européennes qui voient après la guerre d'indépendance américaine des possibilités de sortir de l'enfer du Vieux Continent. Un jeune homme, dont le père est mort dans un ultime combat contre son grand rival "Natif", cherche la vengeance et se sert de la volonté libératrice des migrants. Fonder une nation ouverte, tolérante et libre. Où chacun aura sa place en dépit de ses origines. Amsterdam Vallon va lutter pour son existence, sa vengeance et la reconnaissance de la tolérance. Mais il ne faut pas se leurrer les luttes de l'homme servent toujours des intérêts plus personnels et placer son intérêt dans une lutte collective c'est la marque des grands hommes.
Dans un regard global ce film a une dimension excentrique et déformée de la réalité. On nage quand même parfois en plein délire, des effets sans doute très poins de la réalité dans cette joute politico-vengeresse. La vengeance n'est que le maître mot de cette histoire. Et pour le comprendre pleinement il faut bien comprendre cela, ce n'est pas un film historique mais une histoire humaine, quoique l'histoire de l'homme n'est elle pas qu'une histoire de vengeance, une histoire de sentiment et de confusion? Ce film assez long, retrace la construction d'une philosophie qui sera celle des USA, celle d'un pays qui inspire en permanence à la liberté de chacun quelque soit son origine dans le respect d'autrui. Le regard de Dieu est d'ailleurs omniprésent. Délirant, ce film est quand même un beau rêve, la construction de la mythologie d'une ville, d'un pays. C'est une tragédie, Scorsese est un artiste du tragique, le combat a son issue, quel quelle soit. Un combat antique, un paladin médiéval, un révolutionnaire, la co,striction d'une nation.
Le casting est juste sensationnel, je ne citerai pas tous les acteurs, mais aucun ne fait défaut. La direction d'acteurs est juste exceptionnelle elle aussi, mais comment ne pas réussir à donner un souffle avec autant de qualités? Des acteurs au sommet. Une bande son qui donne aussi un souffle. Des images sensationnelles, une réelles virtuosités. Un film grandissement réalisé.
Ce film est un chef d'oeuvre qui trouve sa place dans la filmographie de Scorsese, avec ses excentricité toutes trouvées pour donner ce sens humain et épique. Une mythologie, un récit profondément héroïque et sensationnellement déroutant et perturbant dans le sens où il fait part à ce sens un peu fantastique du fantasme historique.