Mon tout premier Chahine. Considéré comme l’un de ses meilleurs, Gare centrale se déroule entièrement dans une gare du Caire. Si les trains arrivent et partent, si les voyageurs s’annulent dans l’anonymat, il reste ceux qui vivent et travaillent ici comme Kenaoui (campé par Chahine lui-même) le kiosquier à la sauvette, ou Hanouma, la vendeuse de sodas, pour laquelle Kenaoui voue un amour sans fin. Mais on y croise régulièrement aussi un jeune couple qui semble se voir ici dans le secret. Le film bouillonne, déambule dans ce lieu, de transit pour beaucoup, mais qui devient refuge et purgatoire pour Kenaoui, Hanouma et d’autres. Mais aussi un lieu de séduction, de désirs et frustrations, dont fera les frais ce vendeur de journaux, boiteux, sans cesse moqué, frustré sexuellement, qui tapisse les murs de sa cabane de photos de femmes découpées dans des magazines, et qui par amour de celle qui le méprise, deviendra bientôt fou. Tout en bruits et mouvements, le film file droit vers une tragédie inéluctable. Avec son style proche du néo-réalisme, sa multitude de plans audacieux, son un noir et blanc magnifique, son attention portée au décor, notamment la poussière, les rails, le bruit permanent des trains, Gare centrale est un très beau film.