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On pense à Paul Vecchiali qui ferait un film sur une bande d'ouvrières : partage avec Reichenbach d'un abord franc de la coexistence de toutes les formes de désirs, maille à peine cachée d'un tissu social vivace, qui ne demande qu'un coin de rue pour se signaler, ou la perméabilité d'une sortie des usines (figure brève et bouleversante dans La Machine de Vecchiali, étirée et réitérée avec joie dans Garotas do ABC et Falsa Loura).
En parlant d’ouvriers quittant l’usine on pense aussi à Farocki présentant pêle-mêle les incarnations multiples des idéologies qui traversent les corps. Et une manière de gravité et d’acuité si accrue à observer ses contemporains - les images qui les travaillent, les systèmes politiques et technologiques qui les encadrent - qui en vient à se retourner en loufoquerie. Il me semble que chez Farocki à l'envers de l'austérité méthodique de la forme se crée l'espace d'une pensée ouverte et téméraire, fondamentalement joueuse malgré l'effroi face à ce qui est analysé - même lorsqu'il filme l'inhumanité d'entretiens d'embauches il réalise un western. Conscience de la production d'image et assimilation souveraine de tous ses archétypes qui donne au film son indiscernabilité, sa réserve de métamorphose perpétuelle : fidélité et générosité face aux désirs plutôt qu’aux idéologies (qu’est-ce qu’il sont bêtes, qu’est-ce qu’ils sont beaux et nobles les personnages de Reichenbach !). Cohabitation merveilleuse de telenovela, de Ford, de film érotique à propos d’ouvrières sexy, en même temps qu’épopée politique d’un peuple magnifique.

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le 2 avr. 2019

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