De l'eau dans le ... ?

J'ai trouvé ce film très très moyen... Comme d'ailleurs l'ensemble des longs-métrages de Gilles Grangier qui n'aura pas atteint l'an 2000 (1911-1996) Sauf peut-être "La cuisine au beurre" ?

Tout d'abord, quel bête titre ! Même s'il s'est inspiré du roman "Du raisin dans le gas-oil" de Georges Bayle chez Gallimard, que vous aurez bien du mal à retrouver ! Vous imaginez-vous un film de nos jours appelé SP 95 E 10 ?

Ensuite, s'il produisait ses films "à la chaîne (53 longs métrages) comme le constructeur automobile "Ford" ses modèles T, le réalisateur souvent scénariste, semble avoir "bâclé" celui-ci, et n'était pas en état de grâce... Film alimentaire ?

D'ailleurs, pourquoi aurait-il été assisté de Jacques Deray et Michel Ayats... On sait qu'à cette époque certains assistants servaient plutôt de domestiques mais deux ?

Ensuite, malgré la présence d'Audiard qui rôdait encore son porte-plumes, le récit n'est guère inventif, j'allais même dire banal , poussif !

Un camionneur (Gabin) roule sur le corps de quelqu'un dont on apprendra qu'il était déjà macchabée après avoir fait un braquage ! Du coup, ses complices en ont déduit que le routier peu sympa s'est gardé le jackpot et tentent de l'intimider pour qu'il le restitue ! Vous y croyez-vous ? Moi j'ai trouvé ça infantilisant, d'autant que quand on voit les méthodes de pieds nickelés des supposées terreurs...

Bref, c'est plan-plan et on s'ennuie ferme jusqu'à la moitié du film !

On se demande même si Gabin n'a pas ressenti la même impression : ce rôle de forçat de la route vivant à la petite semaine, n'était pas de ceux qui vous "starisent" un comédien... On dirait presque qu'il "fait des ménages"...

Il n'y a qu'un seul plan qui mérite l'attention et qu'Henry Ford n'eut pas dédaigné, mais comme c'est le seul moment intéressant de cette chasse à l'escargot, je ne vous le dévoilerai pas !

Le casting est lui aussi d'une banalité affligeante : même Jeanne Moreau qui n'en est encore qu'à ses débuts, semble faire de la figuration...

Elle y gagne d'ailleurs avec un naturel et une modestie qu'elle perdra malheureusement et rapidement ensuite, devenue trop adulée et chouchoutée, mais on supprimerait les plans où elle apparaît que plus d'un cinéphile averti ne s'en rendrait même pas compte...

Bref, un film peu passionnant sauf par son approche psychologique et son étude de mœurs du peuple de l'époque...

Aussi par son côté patrimonial ce que Grangier ne soupçonnait pas ! On voit de superbes vieux "bahuts" d'époque comme les modernes Willème, Berliet, et archaïque Renault qui finira sacrifié dans un ravin ! Sacrilège : les collectionneurs vont s'en arracher les jantes !

Et aussi des tramways qui vivaient leurs derniers jours... Images rares !

Comme Grangier avait la "bougeotte" pour ce film (au-moins, on ne lui reprochera pas d'avoir été casanier, pépère, les lieux de tournage sont multiples mais j'ai cru reconnaître les motrices de la ligne Clermont-Ferrand à Beaumont et Ceyrat, dernière survivante du réseau moribond...

Les usagers clermontois n'ont jamais eu de chance avec leurs trams, surtout ceux improprement appelés à pneus ! Une seule motrice me pose problème : elle a un archet alors que les engins de l'époque prenaient leur courant traction à 'aide d'une perche articulée, qui bien souvent sautait faisant la joie des enfants : du spectacle avec ses gerbes d'étincelles...

Heureusement pour Grangier, dans ce film où il ne se passe pas grand-chose, les spectateurs d'après guerre n'étaient pas trop regardants ! Ils ont même été 3 069 911 à se ruer dans les salles pour le voir et le film s'est hissé à la 27° du Box Office sur les 53 ayant dépassé la barre des deux millions de spectateurs... !

Ah, la notoriété de Gabin !

Passerait-il de nos jours le cap du film TV bon marché genre "Meurtres à" ?

Cette année-là, "La belle et le Clochard" trônaient sur le podium avec plus de 11 millions d'adorateurs des animaux...

Bon, on ne sait pas ce qui est advenu au butin, mais ce qui est sûr, c'est qu'à l'époque, la sorcière télévision allait changer le cours du cinéma... Comme l'électrique le gas-oil ? Peut-être ? Peut-être pas : ça dépend de vous et ça se vend très mal ! Archaïque aussi !

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Paris 1° le 12 et 19.11.2024-