Je profite de ce début d’analyse pour rappeler que je ne suis pas un fan du cinéma de Baz Luhrmann, essentiellement pour une question d’anachronisme assez gênante, le bonhomme ayant tendance à mettre du rock dans les folies bergères ou des tubes sur des images des années 30. Une conception du cinéma pour le moins personnelle, donc. Mais ici, le réalisateur fait de sincères efforts de sobriété, en enlevant notamment toutes ces excentricités comme la pub pour l’absinthe dans Moulin Rouge, le genre de séquence what the fuck qui pourrissaient le spectacle. Aux anachronismes musicaux près, la mise en scène est soignée, on manque un peu de retenue par endroits (la beuverie dans l’appartement), mais les lieux de tournages sont éblouissants, et oui, les fêtes sont un plaisir pour l’œil (quoiqu’on ne les montre justement pas assez). Le vrai problème de The Great Gatsby réside autre part : dans sa propension à glorifier le vide et à le sertir d’un écrin bien trop clinquant. Pour ceux qui ne connaissent pas l’histoire originale, Gatsby donne des fêtes grandioses dans l’espoir d’y croiser un soir un amour perdu, qui vit cependant dans la maison juste en face du manoir, séparée par un bras de mer de quelques miles. L’occasion de faire une belle séquence où Gatsby tend la main vers la demeure de son amour de jeunesse, mariée aujourd’hui à un riche héritier qui la trompe à tout va. Les ingrédients du drame sont là, mais tout est ridiculement simple. Rendez vous compte que cela prend une heure et demi à Gatsby rien que pour embrasser Carry Mulligan. Tous les éléments dramatiques s’enchaînent avec une lenteur confinant à l’ennui, quand on ne se perd pas dans des dialogues injustement complexifiant, qui tentent de donner du volume à des enjeux d’une platitude effrayante (Gatsby va-t-il réussir à tremper son biscuit ? La jeune femme va-t-elle enfin dire quelque chose à son mari ?). Gatsby, c’est le drame d’un riche tellement riche, mais l’argent n’est rien en face de l’amour, et il est si timide, ce grand Gatsby… La romance s’étend d’une façon très artificielle, et les enjeux dramatiques s’enchaînent au final trop vite, avec un accident de voiture aussi brutal que volontairement pathétique, faisant basculer d’un coup le récit dans une noirceur pas vraiment méchante. Encore une fin tragique histoire de dire qu’on vient de voir un chef d’œuvre, mais le spectateur n’est pas dupe, il faut un peu plus que des mots de cœur d’un richard parvenu pour nous émouvoir à chaudes larmes. Toutefois, il est important de relever l’excellent numéro d’acteur, qui malgré la naïveté de leur rôle, s’en tirent avec les honneurs (je pense surtout à Joel Edgerton, parce que Tobey McGuire...). Un film pas très convaincant donc sur le plan des sentiments (c’est l’anesthésie générale sur 2h20, mais on ne tombe pas trop dans la niaiserie), mais qui compense avec une facture visuelle assez jolie.
Voracinéphile
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le 22 sept. 2013

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