Après être parvenu à la crête de son style cinématographique avec Sonatine, Takeshi Kitano intentait par ce Getting Any, un retour aux sources de son humour potache de la télévision japonaise, pour se moquer intégralement de ce qu'il a accompli pour être de nouveau créatif (Kitano raconte d'ailleurs que Kurosawa aurait mieux fait de faire un suicide artistique et symbolique à la suite de l'échec de Dodes'kaden). Un tournant artistique qui se concrétisera avec sa fameuse "trilogie" semi auto-biographique qui va suivre.
À ce titre, ce film est fascinant par la bêtise qu'il dégage. Via ce personnage qui ne pense qu'au sexe et s'imagine gagner de belles filles s'il a une décapotable, de l'argent, ou s'il devient acteur, yakuza, invisible, ce film s'enfonce tellement dans la débilité (et aussi parce que ça ressemble davantage à des sketchs enfilés les uns à la suite des autres) qu'on finit par perdre un peu le fil de l'histoire (mais bon, vu comme elle est mince, ce n'est pas bien grave). Les gags sont bien japonais et sont souvent écoeurants, de mauvais goût, mais c'est quand même rigolo de reconnaître certaines sources/genres cinématographiques tournés en ridicule (dans le désordre : Zatoïchi, La mouche, ET, La marque du tueur, ...) et aussi de voir toute sa troupe d'acteurs (que l'on retrouve dans ses autres films) nous soutirant parfois un sourire ou deux devant tant d'absurdité et de scènes "autre" (comment rester stoïque par exemple devant cet exercice du meilleur tueur avec ce sabreur qui dégomme de l'atome, ou encore qui n'a pas rêvé de ces mêmes fantasmes d'adolescent boutonneux - bonus boobs inside - ?).
Bref, un mauvais film, certainement, sans véritable enjeu, mais il faut reconnaître que ce genre d'humour est disséminé dans l'oeuvre de Kitano (les petits jeux à la con par exemple), à petite dose il est vrai, et surtout mieux intégré à l'histoire. Je mets quand même la moyenne, car il a beau être décousu, pas toujours drôle, souvent déconcertant, et même très con, voilà un film qui m'a fait découvrir un certain humour japonais, et surtout un autre visage de T. Kitano que je ne connaissais pas bien (je n'ai donc pas hésité à le revoir plusieurs fois contre l'avis de mon psychiatre).