Je me souviens avoir pour la première fois entendu parlé de Rupert Sanders à la sortie de son premier film. Les critiques étaient loin d’être unanimes, mais une phrase m’est restée en tête « une mise en scène correcte, mais incapable de transcender ses modèles ». Je n’ai jamais vu Blanche-Neige et le Chasseur, pourtant 5 ans plus tard je découvre parfaitement le sens de cette citation après avoir vu le Ghost in The Shell du réalisateur.
N’étant pas dupe, j’approchais depuis le début cette adaptation Hollywoodienne d’une de mes franchises préférées avec le plus grand scepticisme. Néanmoins, étant de nature plutôt optimiste, j’ai fait le choix d’aller le voir en salle. Si je devais faire un compliment au film, c’est qu’il aurait pu être bien pire vu les tares qu’il se traine.
Même si la mise en scène n’impressionne jamais particulièrement, elle a le mérite de faire le taf correctement et d’offrir des scènes d’actions toujours lisibles (même si elles manquent d’enjeux). On sent une réelle volonté de bien faire, et bien que je ne sois pas fan des partis pris esthétiques, ils sont au moins plus cohérents et maitrisé que ce que je craignais.
Je pardonne même les quelques trucs qui m’ont dérangés, comme le rendu des hologrammes ou encore la séquence de dive.
Mais voilà, passé un enrobage sympathique et quelques idées qui auraient méritées un meilleur traitement, le reste du film est complètement à la dérive.
Déjà le script est d’une nullité affligeante. Enchainant les phrases pseudo-philosophiques mais vides de sens, les tournures forcées tellement honteuses qu’elles feraient tache dans un premier jet, quand il n’est pas occupé à enterrer les quelques rares éléments dignes d’attention de son intrigue. A aucun moment les dialogues ne cultivent la moindre ambigüité, trop occupés qu’ils sont à gaver le spectateur – ici considéré au mieux comme un débile léger – d’exposition sur des enjeux plus manichéens et clichés tu meurs.
Et je ne vous parle même pas du résultat sur les acteurs (je préférais Kitano dans Johnny Mnemonic), essayant tant bien que mal de porter cette bouillie affligeante.
Thématiquement, le film essaye de faire illusion mais devant la vacuité de son propos, n’arrive qu’à enchainer les platitudes les plus éculées sur le transhumanisme et notre indentification en tant qu’êtres humains.
Mais le pire, c’est que les responsables de ce film avaient une thématique en or toute prête dans le récit, un truc vraiment neuf dans la franchise et pertinent, mais les abrutis n’ont pas été foutus de s’en rendre compte. J’ai du mal à croire qu’on puisse passer à côté d’un truc si évident et pourtant si puissant, subversif et provocateur.
Je ne porte pas Ghost in the Shell Arise dans mon cœur, mais les OAV et le film avaient au moins pour eux de tenter de construire un véritable discourt témoin de son univers, pas simplement d’aligner des locutions bateau que même un terminal option philo trouveraient ridicules.
Mais là où le métrage fait fort dans la bêtise, c’est dans le pompage constant d’idées venues des autres adaptation animées de la franchise, et en particulier le long-métrage de 1995. J’aurais pu fermer les yeux – après tout, les adaptations qui ont suivies le premier film ne se sont jamais faites prier pour lui faire référence – mais à un tel niveau de foutage de gueule, ça laisse pantois. Des plans autrefois iconiques se voient ici vidés de toute leur substance, ne servant plus que de clins d’œil pachydermique. Il semble que jamais les raisons pour lesquelles ces images bien précises sont devenues cultes n’aient été considérées.
Le plan final recrée ainsi la séquence cultissime ou le Major active sa combinaison pour disparaitre dans le décors. Mais là où Oshii évoquait le lien entre la nature de Motako, les dilemmes auxquelles elle fait face et l’environnement dans lequel elle évolue par un plan magnifique montrant un ville tentaculaire, Sanders lui filme une ruelle en contre-plongée. Et c’est comme ça à chaque fois.
Mais ces « hommages » maladroits ne sont pas innocents, ils sont au contraire symptomatiques d’un produit aveugle et vide de sens, conçu par des artisans visiblement incapables de comprendre la puissance des icônes qui leurs avaient été confiées. On a vraiment affaire à une œuvre Frankenstein.
En parlant d’icônes, celle du Major est complétement absente du long. Non seulement le script lui retire toute l’autorité naturelle qu’on connaissait au personnage, mais la mise en scène est également incapable de lui donner un quelconque moment de bravoure digne de ce nom. Merde quoi, Aramaki est plus icônisé dans ce film !
Pour faire court, ce nouveau Ghost in the Shell est un énorme gâchis. Il aurait fallu couper le cordon avec les œuvres précédentes, des auteurs qui comprennent vraiment le matériau de base, laisser l’histoire se développer naturellement et plonger tête la première dans les thématiques suggérées par le récit. Si cela avait été fait, on aurait pu avoir quelque chose de spéciale entre les mains, ce qui n’est pas le cas ici.
Je ne me suis peut-être pas ennuyé pendant la séance, mais ça reste malgré tout salement médiocre.