Déjà pendant les pubs orwelliennes d'avant la projection me demandais-je si je n'avais pas là commis une erreur en allant voir cette grosse production américaine...
Le plan comm' de GitS rappelle qu'en cette époque de sénescence civilisationnelle l'apparence n'est jamais fidèle au contenu, le meilleur exemple en l’occurrence étant sans doute l'absurde (ou très intelligente, c'est selon) bande-annonce.
Paradoxe moderne par excellence, le sous-texte subversif de GitS est avant tout visuel, d'une esthétique certes repompée mais dont la profondeur l'inscrit au panthéon des meilleurs films de SF de ce siècle. Pour une fois, le fond vert témoigne d'une palette de nuances remarquables, et la forme le suggère suffisamment bien. Si l'on regrette un certain manque de finesse du côté du méchant méchant (Cutter) et du gentil invincible gentil (Kitano qui arrête les balles avec sa mallette), en comparaison de l'original, on serait bien embêté de lui reprocher un manque de développement des personnages. Quant à la trame principale, les modifications apportés le rendent en fait bien plus intelligible que son père spirituel et formel, avec des détails subtils qui ne manquent pas de donner du relief à l'univers d'arrière-plan. On y retrouve d'ailleurs le rythme frénétique et le manque d'aération cependant comblé avec richesse aussi bien par les lumières qui parlent que par les geishas-robots ou les hologrammes urbains. Tant de tableaux, tantôt sombres puis claires, métalliques puis brumeux devant lesquels on s'émerveille.
En major, Scarlett Johanson est parfaitement à sa place et accomplit (semblerait-il) la suite logique d'un parcours qui l'a mené de Lucie à GitS en passant par Under the Skin.
La métaphysique d'Oshii, trop virtuel pour se concevoir pleinement, nous échappe comme l'âme de Kusanagi dans la dernière scène du film d'animation ; celle de Sanders est presque là, presque aboutie, mais jamais radicalement posée.
Comme si l'histoire n'était pas encore prête, la dernière scène un peu rose bonbon n'élucide donc pas vraiment le cas GitS, qui restera sans doute, en tout cas pour ma part, éternel inachevé cherchant à réconcilier son âme et son corps. Pourtant, en 2017, il s'en ait fallu de peu.
PS: À quand une nouvelle version avec Weta Workshop à la technique, Terrence Mallick à la réalisation et Trent Reznor/Atticus Ross à l'ambiance sonore ?