Sorti le 29 mars 2017, Ghost in the Shell est une adaptation en live-action (à comprendre "avec de vrais acteurs") du manga culte de Masamune Shirow. Constamment poursuivi par une polémique autour du rôle principal et ce depuis la révélation de la première photo du film (le Major Kusanagi héroïne du manga étant jouée par Scarlett Johansson) Ghost in the Shell avait à peu près tout de la mauvaise idée, la promotion du film se donnant presque à cœur joie de prouver que quelque chose n'allait pas dans cette adaptation. De l'absolu whitewashing du film à l'horrible remix du thème par un Steve Aoki en manque d'inspiration, il n'est pas faux de dire que cette promotion a été pour le moins mouvementée. Et malgré le "forcing" intensif d'une Paramount tentant de prouver qu'elle avait bien l'aval d'Oshii (réalisateur des deux premiers films animé) et de convaincre le monde entier que "Non, Scarlett Johansson qui joue le Major ce n'est pas du whitewashing parce que...", c'est donc dans une atmosphère presque hostile que Ghost in the Shell est finalement sorti sur grand écrans.
Pour ce nouveau GitS, léger changement de scénario. Le Major (ici renommée Mira Killian) a été créée par la société Hanka, une société dont le but avoué (et dévoilé dès le prologue du film) est d'en faire une arme. Effectivement, et à la manière de l’œuvre originelle, le Major est majoritairement cyborg, puisque seul son cerveau reste encore humain. Placée au sein de la Section 9, une unité antiterroriste d'élite, celle-ci va se mettre à avoir des doutes sur son passé et divers événements, dont l'apparition d'un mystérieux hacker, vont la pousser à chercher à découvrir qui elle est réellement. Soyons franc, de tout ce qui compose ce *Ghost in the Shel*l, le scénario est certainement la chose la plus problématique. La première chose qui frappe est l'absence, ou du moins la mise au second plan de tout les thèmes philosophiques qui faisaient le sel de l’œuvre original. De manière général, l'on sent une volonté de simplifier Ghost in the Shell pour lui permettre d'attirer le grand public. Malheureusement cela se traduit par un scénario bien plus classique puisque reprenant le grand cliché de l’héroïne amnésique à la recherche de son passé ainsi que par la suppression pure et simple de trop longues réflexions sur la relation homme-machine.
Mais pourtant, tout en rejetant quelque peu sa filiation, Rupert Sanders va faire de constantes références aux œuvres précédentes (surtout les deux premiers films en réalité) au point que de nombreux plans font directement écho à des plans des deux films d'Oshii, quand ce ne sont pas des scènes entières qui sont directement tirées de ces mêmes films. Et malgré la photographie impeccable du film il est difficile de ne pas tiquer à la vue d'un film qui semble vouloir raconter une histoire originale tout en référençant constamment ceux qui sont venus avant lui. Mais en réalité cela témoigne d'une volonté qui transparaît à travers tout le film, sa production et même sa promotion : celle de vouloir faire un film de fan grand public. Ghost in the Shell cherche très clairement à amener le grand public à la licence, mais conscient qu'il ne pourra se passer des plus passionnés par celle-ci (ce n'est pas comme si ce n'est pas une œuvre culte) il ne cesse de faire des appels du pieds aux fans. C'est ce qui explique le scénario ultra-classique du film, contrastant avec le fait que peut-être plus de 60% de ces plans soient tirés des deux premiers films, c'est ce qui explique aussi le choix de mettre Scarlett Johansson dans le rôle principal, une actrice célèbre qui pourra parler au plus grand nombre, aux cotés de Takeshi Kitano (qui joue ici Aramagi, directeur de la Section 9), acteur-réalisateur qui ne parlera pas forcément à tout le monde mais semble être un clin d’œil vers un public d'intéressés par le cinéma japonais. Et si le film se révèle être dans un équilibre instable pendant près d'1h40, tout s'écroule dans ses 20 dernières minutes, durant lesquelles sont finalement faites les révélations sur le passé du Major. Des révélations qui loin d'être particulièrement inattendues ou que ce soit, se révèlent être la preuve du je-m'en-foutisme totalement de la production. Ce rebondissement final semble d'ailleurs donner au film un message "anti-whitewashing" absolument dégueulasse en plus d'être hypocrite.
Ghost in the Shell est un échec qui ne réussit ni comme film de fan ni comme un film grand public tant le grand écart qu'il fait entre les deux l'empêche de réellement s'affirmer. Le whitewashing du film, ridiculement justifié non seulement par l'actrice principal mais également par le réalisateur, prouve que les minorités ont encore des combats à mener pour être représentées à Hollywood, et se dévoile comme un ultime bras d'honneur aux fans et acteur/rices asiatiques. Tout cela rend l'échec du film non seulement souhaitable mais nécessaire, et se révélera peut être comme la prise de conscience par les studios que la représentation des minorités au cinéma est une problématique importante qui ne peut être balayée d'un revers de teaser.
Au final, il apparaît que Ghost in the Shell avait le potentiel d’être une adaptation intéressante mais chaque décision prise par la production semble avoir été faite dans le seul but de flinguer le projet... Et bien voilà enfin quelque chose de réussi.