Au milieu des années 90, Mamoru Oshii n'est connu que par une bande d'aficionados, qui ont eu leurs premiers émois sexuels avec Lamu et leurs deuxièmes avec Patlabor ( J'avoue, c'est moins facile pour Patlabor ). Oshii n'en demeure pas moins un artiste dont on connaît plus l'œuvre que le nom. Son prochain projet va changer la donne.
Adapté du manga de Masamune Shirow, Ghost in the Shell le propulsera durablement sur le devant de la scène. Pas un devant de scène aussi mondialement connu que Miyazaki, mais il exercera une influence manifeste sur toute une horde de cinéastes...
Son adaptation, plus sombre, plus cérébrale, fait du manga un conte de fées des temps modernes, une fable sur des êtres sans chair en quête de la signification de leur propre vie. Motoko Kusanagi, femme d'action aussi tête brûlée que philosophe se retrouve confrontée à un cas qui va la faire s'interroger sur ce qui fait d'elle un être humain. C'est Pinocchio au pays de Blade Runner !
Et sur ce canevas alléchant, Mamoru va mettre sa patte inimitable, un soucis maniaque du détail accompagné d'une utilisation intensive d'animation assistée par ordinateur... A sa sortie, Ghost in the Shell ne ressemble à rien d'autre. Certes on peut penser à Robocop et Tron mais stylistiquement il s'éloigne considérablement de ces propositions. Des images fortement contrastées, où les écrans semblent fournir plus de lumière que le soleil même, une palette de bleus et de gris poisseux et sinistres...
Mais surtout l'intrigue est complexe, très politisée, aux codes moraux ambivalents... Dans cette lutte de pouvoir et de course-au-secret, difficile de détacher des clans qui ne soient que gentils où méchants. Les gens agissent pour leurs intérêts et vont jusqu'au bout. Un point c'est tout. En cela, il prend le risque de n'être pas totalement compris ou assimilé, mais il offre une richesse de dramaturgie beaucoup plus dense.
Plus de deux décénies après, Ghost in the Shell continue de fasciner, d'impressionner par sa maestria et sa musique envoutante à jamais... Et ça, tous les remakes foireux n'y changeront rien !...