Un film cru, mais sans grandes ambitions
Ayant particulièrement apprécié le film "La Route" de John Hillcoat, & désirant par-là même m'attaquer aux deux westerns qu'il a réalisés ("The Proposition" & "Des Hommes Sans Loi"), je regarde d'abord l'une de ses premières oeuvres : "Ghosts of the Civil Dead".
Scénario co-écrit avec Nick Cave, comme dans la plupart des films de Hillcoat, "Ghosts of the Civil Dead" narre la décadence progressive d'une prison hautement sécuritaire située en plein désert australien. Là où les prisonniers jouissaient d'un confort suffisant à retenir les violences, les gardiens profitaient du calme en résultant. Toutefois, suite à des incidents, l'administration décide de supprimer au fil des semaines tout divertissement pour les personnes incarcérées. Une émeute se prépare, les tensions se font de plus en plus grandes & les violences plus régulières..
Remettant totalement en cause le système carcéral répressif & abusivement surveillé, le film laisse au spectateur le soin de s'interroger sur l'influence des hauts dirigeants, ceux qui veulent seulement nous laisser voir ce qu'ils désirent. Dans ces conditions, le prisonnier (en particulier le provisoire, celui détenu à cause d'une affaire de drogue, par exemple) ne voit pas son statut mental s'améliorer : bien au contraire, ses pensées criminelles prolifèrent. Ce n'est pas en enfermant un homme pendant des années qu'il en ressort plus sage.
Le thème traité est donc très bon, & les paroles de la fin sont honorables, & rappellent aisément l'allégorie de la caverne de Platon : on voit le monde tel qu'on veut bien nous le montrer, & on l'accepte ; mais au fond, ne sommes-nous pas tous des prisonniers d'instances plus élevées, qui décident de notre sort ? Devons-nous attendre, comme les prisonniers de ce film, que les tensions montent, que nous soyons dépouillés, avant de nous décider à ouvrir les yeux ?
Malheureusement, malgré une très bonne mise en scène, la production semble bien faible, & la réalisation médiocre : tout est très violent, choquant. On expose des scènes très simples destinées à marquer le spectateur. L'interprétation de Nick Cave, qui est aussi un acteur ici, est magistrale : une folie brute qui reste marquée dans l'esprit pendant un temps considérable. Mais la redondance des explications écrites (sous forme de rapport ?), couplée à la voix-off, finit par ennuyer, voire brouiller le spectateur. On comprend la globalité du film, certes, mais quelques détails se perdent à cause d'un blabla trop dense laissant trop peu de place à l'action véritable.
Finalement, ce film est une très bonne double-critique, blâmant ouvertement l'univers carcéral (peut-être qu'un nouveau système devrait être adopté..) &, sous forme de métaphore, la société en général. Il est dommage qu'il souffre d'une réalisation trop brouillonne.