Une fille à la dérive

Susan et Anne sont les deux meilleures amies du monde, et leur vie en colocation à New-York est idyllique. Seulement, cette dernière va partir pour se marier, laissant Susan seule dans ce lieu, sans trop savoir comment joindre les deux bouts en tant que photographe, et sans personne pour remplacer cette copine...

Les années 1970 américaines ont de fascinantes qu'on trouve toujours des perles plus méconnues, davantage issues du cinéma indépendant, et Girlfriend en fait partie. C'est le premier film d'une jeune réalisatrice, Claudia Weill, qui va galérer durant trois ans pour trouver les fonds, jusqu'à sa sortie en 1978 par Warner qui va être un succès surprise. Pour l'anecdote, Stanley Kubrick adorait ce film !

Dans l'esprit, on retrouve du John Cassevetes dans la liberté de ton, du Woody Allen (en moins névrosé) dans la description de cette jeune photographe incarnée avec talent par Melanie Mayron : c'est une fille qu'on voit en manque de repères, qui est comme déracinée après le départ de sa meilleure amie, qu'elle ne peut plus voir à cause de la présence du mari et peu après de la naissance d'un enfant, elle semble perdue. Certes, elle rencontre un petit ami joué par Christopher Guest, mais rien ne peut remplacer cette amitié fusionnelle, cet amour sous-jacent je dirais. Dans le casting, le seul acteur connu (à l'époque), est Eli Wallach, qui joue un rabbin patron de Susan, qui en gros l'emploie pour photographier des mariages ou des bar-mitzvah, mais professionnellement, cette dernière a envie d'exprimer autrement son talent d'artiste...

Girlfriends est clairement un film féministe très intéressant, où le regard de la réalisatrice a son importance, et s'il a été invisible durant des décennies, il a eu un nouveau regain d'intérêt à la suite de sa redécouverte à la fin des années 2010, notamment par Criterion, et son inscription au registre du film américain pour son importance culturelle. D'où le grand regret que Claudia Weill n'ait pas poursuivie sa carrière après son deuxième film, C'est ma chance, où elle fut victime de harcèlement sexuel de la part d'un producteur, pour se tourner vers la télévision et l'enseignement.