Ridley Scott, c’est une trentaine de longs métrages, dont trois ou quatre chefs d’œuvre (ou, du moins, grands films). Quasi inconditionnel de ses réalisations, je lui trouve un immense savoir-faire. Voilà des semaines que j’attendais Gladiator II, et je n’ai pas été déçu. C’est un bon Ridley Scott. Le scénario n'est pas sans faiblesses et on peut n'y croire qu'à moitié. Par contre, quels spectacles ! Quels décors ! Quels jeux du cirque ! Quels combats ! On en prend vraiment plein les yeux !
Sinon, ayant vu deux ou trois fois Gladiator au temps de sa sortie il y a des lustres, je ne l’avais pas revu depuis. Ça ne m’a pas gêné pour apprécier sa suite dont les faits se déroulent quinze ou vingt ans plus tard. Mon souvenir du premier était cependant trop imprécis pour tenter une comparaison qualitative des deux opus.
Gladiator II nous transporte principalement à Rome, alors capitale mondiale du monde civilisé, vers l’an 200 de notre ère, alors que l’Empire romain, parvenu au faîte de la puissance, amorce tout doucement son déclin, un processus qui durera quand même près de deux siècles et demi.
L’histoire est centrée sur un certain Hanno, guerrier capturé par la flotte romaine lors de la prise d’une ville portuaire de Numidie (royaume berbère de l’époque, correspondant plus ou moins, géographiquement, au Maghreb d’aujourd’hui), puis repéré par un riche marchand d’esclaves (Macrinus) à la recherche de gladiateurs, et ramené à Rome pour y combattre, jusqu’à ce que mort s’ensuive, contre d’autres gladiateurs, dans l’amphithéâtre du Colisée où se déroulaient ces fameux jeux du cirque dont les Romains étaient friands. Confronté à ses adversaires, le gladiateur Hanno fait des merveilles, suite à quoi les péripéties s'enchaînent.
La mise en scène de ce Gladiator II est particulièrement soignée et réussie. Les décors, notamment extérieurs, sont impressionnants, superbes, presque grandioses. La production n’a pas lésiné. Toutes les scènes de combats sont remarquablement agencées (seul le duel final, trop frontal et assez prévisible, m'a un peu déçu ; j’aurais aimé que le "méchant" de l’histoire y fasse preuve de plus de traîtrises).
À ce bémol près, les scènes de combat, nombreuses et variées, sont clairement les temps forts du film... qui mérite bien son titre. Les gladiateurs y sont archi-présents, combattent de multiples adversaires (humains ou animaux), dans toutes sortes de situations. Le combat contre des babouins enragés, déchaînés par des fléchettes dont les criblent les organisateurs de l’affrontement, est particulièrement fou et saignant. Celui contre le rhinocéros monté par le "champion" des empereurs jumeaux Geta et Caracalla est tout à fait inédit et, pour le moins, spectaculaire. Le combat des trirèmes (rejouant la célèbre bataille navale de Salamine entre Grecs et Perses) dans l’enceinte du Colisée, transformée en vaste plan d’eau parcouru de requins (numériques) affamés, est un autre "clou" de ces jeux de cirque... que Scott nous fait revivre à peu près comme ils ont existé. Les effets spéciaux sont très réussis. Les effets de foule un peu moins. On sait que l’amphithéâtre du Colisée pouvait accueillir plusieurs dizaines de milliers de spectateurs (autant qu’un grand stade de foot actuel) ; les figurants peuplant les gradins m'ont parfois semblé tièdes, jamais vraiment déchaînés, alors que ceux qui combattent dans l'arène devraient soulever leur enthousiasme.
En revanche, les tenues des soldats (composant les deux armées romaines du final) sont reconstituées de façon très convaincante, elles font vraies. Dans l'habillement de ces soldats, mais aussi des gladiateurs et de la plupart des personnages, les costumiers ont réalisé du super boulot.
Le personnage principal du film : Hanno , qui se révèle être Lucius, fils naturel de Maximus (Russel Crowe) et de la fille de l’empereur Marc-Aurèle : Lucilla (jouée par Connie Nielsen dans les deux Gladiator), est interprété avec conviction, rage, force, fougue, et même charisme par Paul Mescal (découvert dans Aftersun en 2022 et Sans jamais nous connaître en 2023). Gladiator II repose en bonne partie sur ses épaules et lui doit beaucoup.
Dans le reste du casting, on remarque Pedro Pascal , excellent en général Acacius qui, vainqueur des Numides, ourdit avec Lucilla, devenue son épouse, une prise du pouvoir, Joseph Quinn et Fred Hechinger : les empereurs romains jumeaux Geta et Caracalla aussi cruels que pusillanimes, et surtout Denzel Washington dans le rôle du "méchant" Macrinus, à l'ambition dissimulée mais implacable. Un mot enfin sur l’ensemble des gladiateurs (que côtoie ou affronte Hanno/Lucius) : ils sont bien choisis, archi baraqués, et tout à fait crédibles dans leurs rôles.
N’en déplaise aux esprits chagrins ou blasés, j’ai pris, pour ma part, beaucoup de plaisir à ce film. Son intrigue est certes un peu prévisible, mais je n’ai jamais décroché, ni noté de grosses baisses de rythme pendant tout le film, même s’il y a, bien sûr, des pics d’intérêt et d’excitation.
Bref, un Gladiator II plus qu'honorable : passionnant et spectaculaire. Et un Ridley Scott qui, à 86 ans, tient toujours la forme.