Il est communément admis que Goldfinger figure parmi les films les plus estimés de la franchise James Bond. Ce troisième film représente souvent aux yeux des aficionados le franchissement d’un cap, un accomplissement. Après des débuts prometteurs, il est donc temps de faire entrer la saga dans la légende.
Dès les premières minutes, Bond est en action. Infiltration, combinaison, explosion, il ne faut pas longtemps pour profiter d’un petit concentré de « James Bond ». Tel le serpent qui mue, l’agent retire sa combinaison pour dévoiler un superbe costume blanc, reprenant alors son rôle de séducteur, mais les ennemis ne sont jamais loin. Le générique se lance alors, mais pendant ces quelques petites minutes, le spectateur sent déjà qu’une marche semble avoir été franchie depuis les deux précédents films. Pour la première fois, c’est une musique originale qui accompagne tout le générique, avec la voix de Shirley Bassey qui accompagne cette superbe mélodie restée dans les mémoires. Goldfinger, c’est donc le titre du film, qui met ainsi en avant l’antagoniste principal d’une manière inédite. Dans le premier film, James Bond était « contre » Dr. No, préparant alors la confrontation entre les deux hommes. Ici, Goldfinger tient les rênes, et Bond doit explorer son monde pour mettre en lumière ses sinistres desseins.
Contrairement au Dr. No du premier film, Goldfinger ne met pas bien longtemps à apparaître à l’écran. A peine le générique passé, il nous est directement présenté par l’intermédiaire de Felix Leiter, l’éternel ami de James Bond, lequel est d’ailleurs le premier personnage à être incarné par un autre acteur que lors de sa première apparition dans la saga. Goldfinger nous est présenté comme un personnage tricheur et cupide, un homme d’affaires qui prospère, qui va se retrouver dans un jeu du chat et de la souris avec Bond. Mais quand ce dernier abat sa première carte, la riposte de Goldfinger est impitoyable, et le spectateur comprend que cette mission sera périlleuse. Ce qui fait principalement la réussite de Goldfinger, c’est cette confrontation captivante entre James Bond et un adversaire de taille, où chacun abat ses cartes à tour de rôle. Et, autant Goldfinger représente un adversaire imposant, Bond a également pris de l’ampleur depuis ses débuts, notamment à travers un Sean Connery qui semble véritablement avoir gagné en assurance dans ce rôle qui lui sied parfaitement.
A l’instar de Bons baisers de Russie, c’est un James Bond qui garde un côté sombre, notamment à travers l’atmosphère vengeresse qui y règne, cristallisée par l’assassinat de Jill Masterson, entièrement recouverte de peinture dorée. C’est ce qui fait de cette mission pour Bond une quête personnelle, mais c’est aussi l’occasion de rencontrer la première « James Bond Girl » qui semble vraiment lui offrir du répondant, en la personne de Tilly Masterson. A l’image de la course qu’ils se livrent dans les montagnes suisses, elle se présente aussi comme une femme d’action, déterminée. Mais dans Goldfinger, c’est bien Pussy Galore, incarnée par Honor Blackman, qui s’impose. Dans un registre bien différent d’Ursula Andress dans James Bond contre Dr. No et de Daniela Bianchi dans Bons baisers de Russie, elle apparaît comme étant une femme expérimentée, forte, en plus d’être à la solde de Goldfinger, et tenant tête à l’agent britannique. N’oublions pas, non plus, Oddjob (et son célèbre chapeau), autre figure marquante du film, incarnant l’homme de main invincible et impitoyable, succédant à Grant, le tueur de Bons baisers de Russie.
Tous ces éléments s’associent à merveille et montrent à quel point Goldfinger contient tous les ingrédients d’un James Bond réussi. Avec un bon dosage de l’action et une histoire prenante, ce troisième film opère en effet un vrai virage ou, tout du moins, le franchissement d’un cap dans la saga James Bond. C’est le passage de l’espionnage pur d’un Bons baisers de Russie au spectacle plus propre aux James Bond plus récents, sans que le spectacle rende le film plus superficiel, ni que l’intrigue n’empêche d’être diverti. C’est un film généreux sans être trop exagéré (même si nous restons dans le cadre d’un James Bond), une vraie réussite qui continue autant de fasciner aujourd’hui.
Critique écrite pour A la rencontre du Septième Art