Le sang des personnages jailli encore du coeur.

David Fincher s'est fait connaître à travers le monde comme thrilleriste américain altermondialiste plutôt cool. Dans l'adaptation de Millenium il n'aimait déjà pas les femmes mais cette mysoginie artistique mêlée de fascination a atteint un autre niveau avec Gone Girl. Le couple idéal américain, le rêve de succès social qu'on peut attendre des States s'effondre pièce par pièce en deux heures et demie de rebondissements ahurissants.

Devant la Fille Partie on rît de manière très nerveuse, quasiment ironique devant les situations psychotiques et l'intelligence du personnage de Rosamund Pike. Sans y aller de main morte, ce film parle des médias, des paparazzis, de la presse people à scandale, de toute cette raclure de journalistes cherchant, disons le, les emmerdes de la vie des célébrités. Ben Affleck joue au départ le rôle du manipulé essayant d'être simplement gentil malgré la perte de sa femme. On a pitié de lui, de ses maladresses, il n'est pas né à NY dans cette tyrannie de l'apparence mais va y être mis de force, par sa femme qui, comme Emma Bovary en un sens, prendra sa vie pour ces romans, et finalement, va devenir le personnage d'une histoire dont elle a toujours fait partie, de l'Amazing Amy à la Mentally Disturbed Amy ! Aussi, on ne peut s'empêcher de jetter un oeil dérangé aux parents d'Amy en les voyant dans cette tristesse hypocrite devant les caméras. La seule personnage incarnant l'innocence et la justice est Margo, la jumelle de Nick, dans laquelle on voit de vraies larmes couler, c'est la seule vraie victime, la seule qui se sacrifie tant pour son frère, la seule qui n'est pas pourrie de l'intérieur dans toute cette tension sexuelle et médiatique.

Le magazine de cinéma pourtant respectable Premiere parle de ce film comme "A des années-lumière de Fight Club" où ils décrivent le réalisateur de "punk rigolard". Ceux-ci n'ont rien compris ; tout l'univers de Fincher s'y trouve, autant dans un film que dans l'autre : d'un idéal de vivre à l'autodestruction volontaire, cette anarchie au sens strict dans Fight Club est dans Gone Girl psychologique et cachée derrière les mises en abîmes des acteurs qui jouent eux-même des rôles dans leurs vies. David Fincher nous démontre l'art de la manipulation, de l'enquête, du crime, et nous, tendus, cramponnés à nos sièges rouges, regardons se dérouler avec effroi et nausée la chute de deux personnages destructeurs.
Détruit par le pire des fléaux que l'être humain connaisse : l'Amour.
Luc_Bordas
10
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le 11 oct. 2014

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Luc Bordas

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