Elephant men
Une saga familiale italo-américaine vintage mais sans mafia pour une fois, le registre est beaucoup plus naïf et léger. Ca peut même paraître assez cucul lors de certaines scènes gentillettes, ce qui...
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le 9 mai 2018
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Le film commence en italien. Il parle de deux jeunes artisans toscans qui partent aux Etats-Unis, mangent de la vache enragée avant de se retrouver collaborateurs de D. W. Griffith sur le film Intolérance. Le réalisateur américain est joué par un Charles Dance (Tywin Lannister) dont la gravité victorienne sait parfois prendre l'air libéral de la Californie, bref c'est parfait.
Les tous débuts d'Hollywood, quel beau sujet. L'invention du cinéma, avant même les débuts du star system. Cette période pionnière, que décrit très bien Lilian Gish dans ses mémoires, où une équipe de tournage était un collectif où chacun pouvait apporter quelque chose, avant la spécialisation/professionalisation actuelle. Une époque de liberté et - bien sûr - de démesure. Un magnifique sujet, dont le charme transparaît ici, mais pas tout à fait comme je m'y attendais.
En effet, le film se centre sur l'histoire de deux frères, unis par une figure paternelle forte, qui leur demande de rester solidaires et à égalité. On se concentre donc un peu trop sur ce parcours d'immigrants qui cherchent à percer. Le film perd un peu en force en s'attachant à ce destin individuel, dont la trame est assez cousue de fil blanc. Le dénouement est inutilement sombre à mon avis, question de goût.
Il y a aussi une légère bravacherie (je ne dirais pas nationalisme, ce serait trop fort) italienne dans le film. Lorsque nos deux héros se heurtent à un manager italianophone, Nicolà lui répond "De qui es-tu le fils ? Nous nous sommes les descendants des maîtres de la Renaissance ! Nous avons restauré les cathédrales de Pise, Florence, Sienne !". Et une figurante américaine, témoin de la scène, renchérit en disant que Florence, c'est très beau. On entend aussi plusieurs fois des chants d'immigrés italiens, qui émeuvent nos héros.
La symbolique est un peu lourde par moments (l'assiette des deux frères qui va de l'un à l'autre à cause du roulis lors de la traversée de l'Atlantique, les vagues qui effacent le graffiti "Adio Italia !" sur le bateau, les lumières de Manhattan qui rappellent le sapin éclairé de bougies). Il y a des allusions plus subtiles : à mon avis, la scène du train fait référence à L'attaque du rapide. Et les deux compères qui courent ensemble rappellent un couple de films muets.
Le film a visiblement été tourné en Italie, et par moments, on voit qu'il y a du bricolage : je pense aux maquettes d'immeubles illuminés de Manhattan vues par le hublot, et à l'usage de stocks shots, assez visible et maladroit. La magie des décors d'Intolérance fait son effet, dans de trop rares scènes, mais la reconstitution n'est pas toujours à la hauteur.
La musique, orchestrale, est entre celle de Rotta et de Gershwin. Les actrices féminines sont d'une sensualité qui suffirait à signaler que l'on est dans un film italien.
Good morning Babylone est un film très attachant par son sujet, qui a quelques ficelles d'écriture un peu grosses et quelques défauts d'exécution. Il mérite cependant amplement le visionnage, a fortiori si vous vous intéressez aux débuts d'Hollywood. En tout cas le film me donne envie de creuser la filmographie des frères Taviani, même si leurs films se situent plutôt dans l'Italie rurale, si j'ai bien compris.
Synopsis : Un architecte dévoile la façade terminée d'une cathédrale. Il annonce à ses sept fils, qui ont participé au chantier, qu'il prend sa retraite. Après des disputes, les deux plus jeunes, Andrea et Nicolà, les plus talentueux, décident de partir aux Etats-Unis pour trouver l'argent pour racheter les parts de l'entreprise familiale.
Arrivés en Amérique, ils dérivent en faisant de petits boulots. Sans faire exprès, ils arrêtent un train à vapeur. Ils tombent sur des artisans italiens allant préparer l'exposition universelle de San Francisco. Ils montent dans le train. A l'exposition, on projète Cabiria et D. W. Griffith, impressionné, paie une nouvelle séance rien que pour lui. Impressionné, il veut faire mieux et embauche les contremaîtres italiens de l'exposition universelle.
Andrea et Nicolà se font passer pour eux, assistent au tournage d'une scène d'Intolérance. Leur usurpation d'identité est découverte. Ils attrapent des lucioles pour draguer deux jolies figurantes, Edna et Mabel.
Ils font des petits boulots : entretenir une volière, actionner des panneaux d'éclairage. Par eux-mêmes, ils construisent l'éléphant grandeur nature dont Griffith a besoin, en arrachant des affiches pour faire du papier mâché. Les filles tombent dans leurs bras. Un photographe voit l'éléphant, le blanchit pour la caméra. Mais le responsable du personnel de Griffith, qui n'aime pas les ritals, le fait incendier. Les frères le tabassent, et vont au poste. Griffith voit les rushes, veut 6 éléphants et paient leur caution. Ayant enfin percé, ils font venir leur père pour un banquet avec Griffith, au pied du décor de Babylone. Le père exprime sa déception qu'ils ne soient pas revenus en Italie, ce qui plombe l'ambiance.
Intolérance sort et rencontre un vif succès, cependant perturbé par l'éclatement de la guerre en Europe (le film est résolument antiguerre). Le fils d'Andrea naît : il lui donne le nom du père, Bonanno. Nicolà n'a pas cette chance : sa femme meurt en couche. Les deux frères se brouillent, car ils ne sont plus égaux. Andrea n'arrive plus à travailler. Nicolà rentre en Italie faire la guerre. Andrea s'engage aussi, côté américain. Les deux frères se retrouvent, gravement blessés. Avant de mourir, ils se filment à tour de rôle sur une caméra, pour leurs enfants.
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le 9 août 2018
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