George Clooney qui s’attaque à la bio pic d’Edward Murrow, journaliste qui fut l’un des plus grands détracteurs de Mc Carthy, cela pouvait prêter à sourire. Mais le préjugé dans ce cas présent est vaincu. « Good night and good luck » est un film redoutablement brillant par sa structure et son message politique. Le fait de vouloir conserver les interventions d’époque du sénateur entraînait l’utilisation d’une photo en noir en blanc. Premier choc puisque le rendu final est exemplaire, servi par un montage ingénieux. Le scénario ensuite. Deuxième choc. Certes le conflit Murrow/Mc Carthy tient la part belle de l’histoire, mais le message va bien au-delà, et en devient même prétexte à une critique beaucoup plus générale sur le pouvoir de la télévision. On sent bien qu’à chaque fois que Murrow marque des points, son enthousiasme reste pondéré, son inquiétude est omniprésente. L’ennemi mis à bas, la télévision sera quand même bâillonnée. Elle perdra sa faculté d’instrumentalisation de connaissance et de réflexion au profit de la rentabilité, et donc de la facilité. Le début et la fin du film le soulignent parfaitement. Autre idée géniale, afin de temporiser chaque étape du film, Clooney place une incrustation musicale. Véritable pause dans le discours, permettant aux personnages d’absorber le moment passé, et à nous spectateur de les analyser. Mais si ce film est aussi bien fait, cela ne tient pas uniquement aux choix de mise en scène ou à la technique. Cette réussite porte aussi un nom : David Strathairn. Troisième choc. Il n’incarne pas le personnage, il est tout simplement hanté par lui, et c’en est saisissant. Dans son sillage les autres acteurs restent certes au second plan, mais sont tout aussi bons.