Par rapport à ce qu'on m'avait vendu, je suis un poil déçu, parce qu'il manque une certaine intensité que possédait Les fils de l'homme, et qui continue de me coller au siège vision après vision (alors que j'ai déjà du le voir une bonne dizaine de fois). Forcément, Gravity a un script assez mécanique dans la pure tradition du film catastrophe, c'est à dire que (sans en dire trop) chaque nouvelle situation est à nouveau une situation foireuse. C'est simple et efficace, mais du coup assez prévisible. Heureusement cependant, aussi prévisible soit-il, c'est d'une efficacité épurée folle. C'est focalisé, clair, et vierge de tous les ajouts à la con habituellement demandés par les studios : pas d'amourette inutile, pas de compte à rebours explicite, pas de méchant qui sort de nulle part.

Non, ce qui force le respect, mais alors sévère, c'est la maestria technique que déploie Cuaron. Je me suis dit en sortant du film "ça manquait quand même d'intensité" juste avant de me dire "alors pourquoi t'as passé la moitié du film la bouche ouverte ?".
Parce que grand dieu que c'est beau. Tous les films filmés avec les pieds que j'ai pu voir ces dernières années me sont revenus en criant "Pourquoi on n'a pas eu droit à Cuaron, nous ?" (oui, World War Z, je pense grave à toi).
Il y a une maîtrise de la gestion de l'espace hors du commun qui, couplée à l'utilisation magistrale des plans séquences, résultent en un film absolument magnifique, qui tourne et tourne et retourne sans jamais qu'on s'y perde. La 3D fonctionne bien, bien qu'alternativement assez légère ou parfois un peu trop démonstrative, mais bien intégrée, et permettant un niveau supplémentaire d'appréciation de la mise en scène.

Je regretterais juste l'utilisation de nombreux plans en vue subjective, procédé qui a sa logique, certes, mais qui transforme une mise en scène au plus près des personnages en une mise en scène un peu artificielle, d'autant plus que les visuels très numériques du film génèrent du coup une impression d'être devant un jeu vidéo dont on n'aurait pas la manette.

Et puis, il y a tout simplement des scènes monstrueuses, que ce soit le maintenant fameux plan séquence introductif proche des 15 minutes, plongeant le spectateur du travail de routine au coeur du film avec une efficacité folle, ou LA scène mouvementée du milieu du film, montée d'une main de maître, et couplée à un travail formidable sur le son et la musique.

Parce qu'il y a la mise en scène, et il y a aussi le design sonore. Si je trouve la musique parfois un peu trop présente, et la présence un peu déplacée d'un vieux jump scare pourri et complètement inutile en début de film, force est de constater que l'ensemble soutient formidablement bien les images.

Pour autant donc, je suppose qu'il faudra une 2e vision plus tardives de Gravity pour estimer s'il vieillira aussi bien que Les fils de l'homme, dont je suis persuadé qu'on en parlera encore dans 20 ans. Pour Gravity, j'ai quelques doutes, mais j'espère fortement me tromper.
Remy_Pignatiell
9
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le 20 oct. 2013

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