C'était le film de ce début d'année 2019 qui me donnait le plus envie notamment pour son duo d'acteurs et son immersion dans l'Amérique des 60s et ce même si la BA laissait entendre que le film était taillé pour les oscars. Quand on voit les louanges que reçoivent bon nombre de films insipides ces dernières années, on a le droit d'être circonspects. Comme tous les films qui portent le panneau "tirée d'une histoire vraie", on n'échappe pas à une réalisation convenue (tout en étant bonne) et une prise de risque minimum. Peter Farrelly - habitué aux comédies burlesques plus ou moins médiocres - nous propose néanmoins de magnifiques plans de la Bible Belt et une mise en scène qui fait le job.
Autre élément qui est à saluer : le film évite la lourdeur commune à la plupart des films qui traite de la ségrégation. Le choix d'opter pour la comédie dramatique est judicieux car elle permet d'apporter de la légèreté sans pour autant éluder la gravité des Jim Crow laws. Le Green Book n'est finalement pas la chose la plus centrale du récit, il est le fil rouge sans pour autant être le métronome de l'histoire. Il finit par être surpassé par l'amitié qui va se forger entre ce pianiste noir virtuose et sophistiqué et ce videur italo-américain rustre du Bronx. Le film n'oublie pas son étiquette de feel good movie et ne tombe pas dans la mièvrerie ni dans un réquisitoire moralisateur. Je mettrai peut-être un bémol sur le fait que Don Shirley soit présenté comme étant gay alors que ce n'est pas du tout le cas. N'oubliez pas que j'ai dit que ce film transpirait l'Académie.
Mais revenons sur LE point fort du film. On rit beaucoup autour de ces deux personnages surtout lorsque Don Shirley éduque son chauffeur tel un gamin. Beaucoup de vérités et interrogations de la vie de tous les jours sont présentées de façon dérisoire. L'exemple de la pierre est intéressante avec cette curieuse tendance humaine à vouloir voler quelque chose non pas parce qu'on en a besoin mais parce qu'on peut la voler. On a aussi des scènes tordantes à chaque fois qu'il retombe dans ses travers comportementaux et qu'il se fait réprimander par Don Shirley (le coup du goblet de soda, juste excellent). Bref, les dialogues sont géniaux tout en faisant réfléchir sur certaines questions toujours d'actualité aujourd'hui.
Il est clair que je n'aurais pas autant aimé le film si le casting avait été différent. Ces deux personnages de caractère sont sublimés par le polyglotte Viggo Mortensen dont le retour fait vraiment plaisir depuis le très bon Captain Fantastic et par Mahershala Ali dont la jeune carrière sur le grand écran n'en finit plus de décoller. Intéressant de voir que son jeu se bonifie avec le temps comme un certain Matthew McConaughey.
Green Book est une comédie dramatique intelligente racontant une histoire authentique et touchante et même s'il reste dans le carcan des Oscars du film pseudo-engagé, il n'en demeure pas moins très réussi.