"C'est quoi ça, un manga japonais? Ou un film de Luc Besson?"
C'est par cette phrase qu'au bout de quinze minutes "Gun Woman" lève enfin toute ambigüité sur son héritage dans ce récit de vengeance minimaliste où un médecin achète et entraîne une jeune femme pour en faire l'assassin capable de tuer le violeur et meurtrier de sa défunte épouse.
Asami est donc Mayumi, la Gun Woman. Échappée de ses productions crétino-gores habituelles où pleuvent l'action et les délires visuels à la "Tetsuo", elle incarne ici le parfait mélange d'extrême vulnérabilité et de violence quasi-animale (elle ne ne prononcera pas un mot de tout le film) remodelé par la main d'un homme, à la fois sauveur et bourreau, dont raffole le genre female action.
Passée une première moitié un peu longue, basée sur une structure narrative type "récit dans le récit" et qui se concentre essentiellement sur l'entraînement et les relations brutales développées entre la Gun Woman et son Pygmalion, le film révèle une dimension quasi-insoupçonnée: le rapport au corps et à la douleur.
Du physique terrifiant de Noriaki Kamata, corps sec et blafard à l'aura démoniaque sous une apparence presque comique, de ses pulsions nécrophiles et cannibales qu'il assouvit dans un club très sélect, de l'arme implantée directement dans le corps de Mayumi par chirurgie qui ne lui laisse qu'une vingtaine de minutes après extraction pour accomplir sa mission avant de se vider de son sang, de la violence et de l'impact des coups portés sans volonté d'esthétisation sinon une rage primaire, tuer coûte que coûte et salement si nécessaire.
Tout est charnel, tout est sexuel, tout est douloureux, tout est lutte et déni de ses sensations, de son corps.
Ce côté très rentre-dedans du film doit beaucoup à son éclairage et son utilisation de lumières crues, un peu sales, presque obscènes et à une photographie brute. Quand à la mise en scène, elle se la joue rétro façon 90's (comme la B.O d'ailleurs) et, si elle demeure correcte, souffre d'effets un peu cheap et d'une narration poussive, la faute à une écriture mal assurée.
Sans être un chef-d’œuvre, "Gun Woman" est une bonne série B qui parvient à atteindre cet équilibre difficile entre recyclage d'éléments ayant fait leurs preuves et une originalité qui avance masquée. Toutefois, c'est bien l'atmosphère profondément viscérale et l'actrice principale qui constituent la véritable réussite du film et justifient sa vision.