C'est parti pour la leçon de philosophie de comptoir: qu'est-ce que la vie sinon un assemblage de code? On passe notre existence toute entière à chercher l'osmose avec nos congénères, avec la nature, avec ses papiers qui nous pourrissent le moral... Les nations tentent de dresser une toile invisible de relations entre elles, les multinationales s'attachent les unes aux autres via divers accords, la ville contraint les individus de différentes classes à cohabiter ensemble, ou plutôt les uns sur les autres (au sens propre et figuré)... La cellule, origine même de la vie, n'est elle-même rien d'autre qu'un assemblage de données codées dans une cohérence quasi miraculeuse.

Ce constat a été largement illustré, exploré au cinéma de bien des manières, le générique culte de Matrix en est probablement le meilleur exemple. Pourtant, si cela a déjà été traité, peu des films choisissent d'en faire le sujet central de leur intrigue. Il aura fallu attendre le retour de Michael Mann, pas complètement remis des bides conséquents qu'avaient été ces derniers long-métrages pour voir cette thématique poussée à son plein potentiel. Dans un thriller qui désarçonnera, à la fois cérébral dans son fond et purement conceptuel dans sa forme. Car Michael Mann filme le monde des Hacker (ou "Blackhat") comme il filmerait un flux d'ondes ou de données circuler dans un réseau alimenté en permanence. Dans ce marasme d'information, des individus microscopiques, qui cherchent seulement à se connecter les uns aux autres. Des services gouvernementaux de deux nations en rivalité, un frère et une sœur, un homme et une femme... Alors quand cette communion peut enfin avoir lieu, c'est toujours suite à une confrontation forte en dommage ou en tension: une embrassade lors d'une remise de peine suite à une négociation musclée, une bagarre dont l'issue est la mort conduit les protagonistes à s'unir, la mort de leur guide les poussant par la suite à s'allier dans la vengeance, cette fois...

"Blackhat" c'est la recherche du lien dans un monde morcellé, où l'éthique et la morale paraissent toutes deux obsolètes. Ou finalement la libération passe par le fait de traverser les lignes de codage, à l'image de ce final d'une puissance visuelle hors du commun. Une ultime bataille pour l'humanité, illustrée par une violence viscérale. Après la confrontation, le rôle du Hacker prend fin, l'équilibre est rétablit. Reste la récompense, à savoir la fuite dans l'anonymat. Et l'Univers de continuer son cours, vaste toile d'informations liées entre elles.

Aegus
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Cet utilisateur l'a également ajouté à ses listes Ces films détestés par tout le monde... Sauf moi et Films criminellement sous-estimés

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le 20 août 2024

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