Les âmes sombres ne sont pas celles qui choisissent de rester dans l'abîme mais celle qui choisissent de s'en évader pour errer, silencieuses, parmi nous.




John Carpenter vs Rob Zombie, une véritable confrontation entre deux maîtres de l'horreur



En 2007, le réalisateur Rob Zombie a entrepris un projet audacieux en écrivant, réalisant, et produisant un remake d'un classique de l'horreur qui avait marqué l'histoire du slasher : "Halloween : La Nuit des masques", initialement réalisé par John Carpenter en 1978. Cette entreprise courageuse a amené Rob Zombie à consulter John Carpenter lui-même pour obtenir des conseils. Carpenter lui a conseillé de réaliser le film à sa manière, considérant que la franchise était maintenant entre de nouvelles mains. Rob Zombie a répondu à ce défi en offrant une interprétation radicalement différente de celle de Carpenter, tout en respectant l'œuvre originale. Cette approche a été saluée par les critiques et a rencontré un succès au box-office, conduisant à la création d'une suite dont l'accueil a été plus mitigé, mais cela est une histoire à suivre dans ma critique du deuxième volet de Rob Zombie, « disponible ici ». Toutefois, malgré ses intentions louables, Rob Zombie a suscité des commentaires négatifs en ce qui concerne John Carpenter. Ces commentaires ont provoqué une tension entre les deux réalisateurs, et John Carpenter a répondu à ces critiques lors d'une interview, exprimant son point de vue sans mâcher ses mots : « Il a menti à mon sujet. Il a déclaré que j’avais été très froid avec lui quand il m’avait annoncé qu’il était sur le point de faire le remake d’Halloween. Rien ne serait plus éloigné de la réalité. Je lui ai dit « Fais ton propre film mec. C’est ton truc à présent. Ne t’inquiète pas pour moi ». J’ai été totalement de son côté. Pourquoi cette petite merde a menti, je l’ignore. Il n’avait aucune raison de le faire. Pourquoi a-t-il fait ça ? Franchement, cela risque d’influencer ma réception du film. Si j’en faisais abstraction, ce qui n’est pas le cas… Je pense qu’il a retiré le côté mystique de l’histoire en expliquant trop de choses au sujet de Michael Myers. Ça ne m’intéresse pas. Il est censé être une force de la nature. Il est presque surnaturel. Et il était trop gros. Ce n’était pas normal. » John Carpenter vs Rob Zombie, attention ça va saigner ! Une guerre entre les deux réalisateurs qui s'est rapidement apaisée à l'époque, avec John Carpenter qui a finalement déclaré : « A tous ceux qui ont été fascinés par la bagarre John Carpenter/Rob Zombie, c'est du passé. On s'est parlé dimanche. On a enterré la hache de guerre. Passons à autre chose ». Depuis lors, ces deux maîtres de l'horreur ont enterré la hache de guerre et travaillent de manière collaborative pour terrifier joyeusement les âmes innocentes lors de la nuit d'Halloween. Ils s'adonnent à une série de meurtres à qui mieux mieux, en particulier en punissant les imprudents qui osent sonner à leurs portes pour des friandises. Leur réponse à la question classique "Des bonbons ou un sort ?" est sans équivoque : "la mort !" C'est une façon mémorable et malicieuse de célébrer cette fête spéciale, et je vous encourage à vous joindre à cette célébration à travers ma critique.



Allons-y pour ma critique, avec un zeste de passion et une pincée d'horreur pour pimenter les choses !



"Brutal" et ô combien "dramatique", ce sont les termes qui me viennent à l'esprit pour caractériser ce film, auquel je vais tout d'abord examiner sa trajectoire émotionnelle. Le film de Rob Zombie plonge profondément dans l'exploration de la psyché du meurtrier, s'efforçant de comprendre l'origine du mal et de le rendre plus humain grâce à une approche psychologique et rationnelle, ce qui représente un contraste frappant avec le film original. Dans le film de John Carpenter, Michael Myers est dépeint comme une figure fantomatique dont on ne sait presque rien du tout, une entité purement maléfique, dépourvue de toute nuance humaine. Zombie, en revanche, choisit de creuser davantage en remontant dans le passé de Michael Myers, pour nous montrer comment un jeune enfant, victime de circonstances tragiques, bascule lentement vers la monstruosité. Ce choix narratif original nous conduit à suivre le parcours d'un enfant qui, à travers des expériences traumatisantes, se transforme peu à peu en l'incarnation du Mal. Toutefois, contrairement au Mal absolu de Carpenter, ce Myers conserve une petite lueur d'humanité, notamment à travers son attachement à sa petite sœur, Laurie alias Boo, son dernier lien avec sa mère et, par extension, avec le sentiment d'amour et d'affection. Cette nuance ajoute une complexité intrigante au personnage de Myers, le rendant plus tragique, tout en offrant une perspective psychologique plus approfondie sur son évolution vers le mal. Cela élargit le débat sur la nature du mal dans le contexte du film, mettant en valeur l'impact de l'environnement et des traumatismes sur la transformation d'un individu en une force maléfique. Cela transcende notre compréhension du regard vide et sombre de Myers, qui commence à révéler sa part d'humanité malgré le bain de sang qui l'entoure. Bien que cette dramatisation le dépouille de son statut antérieur en tant que Croque-Mitaine inhumain, au-delà des limites du simple meurtrier, il émerge comme un tueur en série impitoyable, méritant pleinement le titre de Croque-Mitaine, mais sans jamais atteindre la divinité qui lui était autrefois associée. Ce contraste marquant suscitera des réactions variées : certains le critiqueront, estimant que l'on ne devrait pas humaniser le Mal ni chercher à le rationaliser, pour maintenir sa terreur absolue. D'un autre côté, il offrira à d'autres une dimension dramatique et une cohérence psychologique, réalisant un lien au-delà du simple affrontement entre le bien et le mal. Chacun possède son propre livre sacré de l'horreur, et, personnellement, je trouve légitime d'explorer ces deux voies. Bien que mon cœur demeure inébranlablement fidèle à la vision de Carpenter, il reste ouvert à l'exploration de l'univers que propose Zombie.


Tournons maintenant notre attention vers le terme « brutal », et il est indéniable que ce film est implacable et d'une violence inouïe. Les meurtres s'enchaînent de manière effrénée, et Myers se livre à une véritable boucherie, se révélant bien plus brutale que ce à quoi nous étions habitués de lui. Cela peut paraître étrange, car l'exploration de sa part plus humaine le pousse à se montrer plus acharné et dévastateur que lorsqu'il incarnait une entité inhumaine. C'est un contraste saisissant où, une fois de plus, les visions de Carpenter et de Zombie s'opposent. La vision de Big John privilégie avant tout une ambiance oppressante, captivant le spectateur non pas à travers des meurtres sanglants, mais en utilisant le regard voyeur de Myers, tel un fantôme obsédant ceux qui se trouvent sur son chemin par sa présence furtive et insaisissable, pour mieux nous prendre par surprise de manière insidieuse. D'un autre côté, bien que Zombie effleure l'aspect voyeur, il préfère confronter le spectateur à une cruauté impitoyable à travers l'évolution ultraviolente du personnage, lorsque le garçon gentil cède la place au bourreau. C'est une manifestation troublante, car elle met en lumière la dimension tragique du personnage auquel on peut s'attacher tout en ressentant du dégoût à cause des massacres. Des meurtres impitoyables et spectaculaires qui consacrent Myers en affirmant sa présence de manière frontale, tel un implacable destructeur sans pitié. Ces exécutions répugnantes nous clouent à notre siège en accumulant les cadavres, rivalisant en surenchère par rapport à la version précédente. Elles nous offrent des scènes cultes, comme le massacre de la famille Myers alors qu'il était encore un enfant, le carnage dans le couloir de la prison face aux gardiens que notre tueur déchire de manière inattendue, suivi de la noyade de son sympathique geôlier qui était jusque là compatissant envers lui. Il y a aussi le meurtre brutal d'un routier posé sur les toilettes publiques, écrasé par la puissance incontestable du Croque-Mitaine, ainsi que le massacre sans pitié de la famille adoptive de Laurie, où Myers tente même de communiquer avec la mère en montrant une photo de sa sœur, suscitant des interrogatoires sur la manière dont Michael a pu deviner qu'il s'agissait de Boo. D'autres scènes percutantes incluent les meurtres des amis de Laurie, qui sont abordés de manière bien plus réaliste et rude que d'habitude. Puis, la confrontation finale !


Ce dernier combat est à la hauteur, combinant efficacement l'impact visuel et l'émotion à travers une séquence tragique et injuste. Michael réunit sa famille dans sa maison d'enfance, se dévoilant en retirant son masque et en déposant son arme. Néanmoins, la petite sœur, ne comprenant pas la situation, le frappe brutalement, mettant fin à la dernière parcelle d'humanité de Michael. Mais va-t-il pour autant vouloir sincèrement tuer sa sœur ? Cette question demeure sans réponse et trouvera son dénouement dans la suite. Tout cela nous conduit à un combat final d'une cruauté déchirante, qui aurait dû constituer la conclusion parfaite de tout ce cauchemar. Laurie, ignorant toujours que Michael est son frère, se retrouve gravement blessé, gisant à ses côtés. Elle pointe son arme sur lui, prête à lui tirer une balle en pleine tête, aspergeant son visage de son propre sang. Ce geste se conclut par un cri de terreur ultime, nous renvoyant cruellement à l'innocente vision de Michael et Laurie, à l'époque où elle n'était qu'une petite Boo. Deux visions de l'horreur radicalement différentes s'affrontent une fois de plus, et c'est là que je trouve la diversité appréciable. Nous avons le choix entre une version qui mise sur une atmosphère oppressante et malsaine usant de subtilité pour susciter une angoisse maximale, et une autre qui privilégie le gore, tout en explorant une introspection tragique qui assure une brutalité tant sur le plan du fond que de la forme. La composition musicale de Tyler Bates, bien qu'appréciable, se voit rapidement éclipsée par la composition originale et emblématique de John Carpenter. Cette dernière demeure gravée dans nos mémoires, imprégnant l'ambiance du film d'une manière unique. La direction artistique confiée à TK Kirkpatrick reflète parfaitement le style cinématographique de Rob Zombie. Elle adopte une conception visuelle résolument réaliste, offrant une image crue, sombre et répugnante. Cette démarche est renforcée par la photographie de Phil Parmet, qui mise grandement sur cette approche pour garantir un impact visuel saisissant, même si elle peut sacrifier certains aspects de la mise en scène cinématographique. Les décors, conçus par Anthony Tremblay et Lori Mazuer, sont fonctionnels, mais je trouve l'exploration de l'environnement de la fête d'Halloween un peu pauvre. Toutefois, on trouve quelques clins d'œil bienvenus à d'autres films d'horreur, utilisant la même démonstration que dans l'opus original. Il convient tout de même de souligner le bon boulot réalisé autour du décor du sous-sol de la maison des Myers dans la scène finale, ainsi que sa cellule d'emprisonnement avec les nombreux masques. Un travail remarquable est à noter du côté des costumes, sous la houlette de Mary E. McLeod. Elle revisite le masque emblématique de Michael Myers, lui donnant une version plus délabrée. De plus, elle offre à Myers une variété d'autres masques, dont l'un particulièrement réussi, fabriqué en papier mâché et représentant une citrouille.


En ce qui concerne la distribution, il est difficile pour moi d'avoir une opinion tranchée. Le casting dans l'ensemble s'en sort plutôt bien, avec quelques performances marquantes, mais d'autres m'évoquent un sentiment mitigé, un peu comme un "c'était bien, mais c'était quand même mieux avant". Permettez-moi de développer. Malcolm McDowell livre une solide interprétation du Dr Samuel Loomis, jouant avec succès sur la relation entre lui et Michael, depuis l'enfance jusqu'à l'âge adulte. Toutefois, il est indéniable que Donald Pleasence apportait une dimension supplémentaire en incarnant le poids de la diabolisation de Michael, ce qui renforçait considérablement la peur émergeante autour de sa symbolique. Le même constat vaut pour la chère Scout Taylor-Compton, qui interprète la plus mémorable et iconique des baby-sitters, Laurie Strode. Bien qu'elle s'en tire plutôt bien, son cri tend à m'agacer. Elle ne parvient jamais à égaler Jamie Lee Curtis, dont le charisme était bien plus marquant malgré son jeune âge. De plus, Jamie Lee Curtis avait l'avantage d'avoir plus de temps d'écran, ce qui a permis un développement plus approfondi de son personnage. Le film se divise en deux parties distinctes, l'une centrée sur l'enfance de Michael et l'autre sur le récit principal. Par conséquent, l'intrigue progresse rapidement, laissant peu de marge pour le développement de certains personnages. Daeg Faerch, dans le rôle de Michael Myers à l'âge de 10 ans, est sans aucun doute la meilleure surprise de ce casting. Il offre une interprétation totalement crédible qui donne des frissons. À la fois touchant et effrayant, il réalise un excellent travail. Quant à sa version adulte, incarnée par Tyler Mane, elle me laisse totalement abasourdi en raison de sa masse imposante. C'est une véritable machine qui fait peur à voir et qui n'a rien à voir avec la version proposée par Nick Castle. C'est une machine de guerre, et je me demande comment il a pu, dans sa cellule, en passant tout son temps à fabriquer des masques, entretenir un corps aussi imposant. Cela soulève des questions, probablement en rapport avec le personnage du geôlier bienveillant incarné par Danny Trejo, qui devait sans doute glisser dans la bouffe de son petit protégé des stéroïdes. En outre, on retrouve la clique habituelle des comédiens qui suivent le réalisateur avec Sid Haig, William Forsythe, Ken Foree, notamment Sheri Moon Zombie, qui sous les traits de Deborah Myers, offre une performance très convaincante. Un petit applaudissement bien mérité pour les deux enfants que Laurie garde, Tommy interprété par Skyler Gisondo et Lindsey jouée par Jenny Gregg. Ils font un excellent travail en contribuant à renforcer l'aura de Croque-Mitaine qui entoure Michael Myers. Il est également à noter que c'est réjouissant de retrouver Brad Dourif, connu des initiés en tant que Chucky, dans le rôle du shérif Leigh. De plus, la présence de l'actrice Dee Wallace, qui incarne Cynthia Strode, est une agréable surprise. Il est important de rappeler qu'elle est elle-même une icône de l'horreur, ayant marqué des titres emblématiques tels que "Hurlements", "La Colline à des yeux", "Cujo", "Critters", et bien sûr, "E.T., l'extraterrestre."



CONCLUSION :



"Halloween" de Rob Zombie est une relecture audacieuse et perturbante du classique de l'horreur de John Carpenter. Le réalisateur injecte sa propre vision sombre et réaliste dans l'histoire de Michael Myers, offrant une perspective plus profonde sur les origines du tueur en série emblématique en tentant de donner une dimension plus humaine à ce personnage autrefois vu comme une entité purement maléfique. Cette approche psychologique et le développement de l'histoire antérieure de Myers ajoutent une nouvelle couche de complexité au récit. Le film est brut, violent, et explore le traumatisme et la folie de manière convaincante. Bien que certaines performances et aspects du film puissent diviser les fans de la franchise, il parvient à apporter sa propre contribution à l'univers de Halloween.


Un remake pertinent qui nous propose un duel captivant entre deux légendes de l'horreur, assurant une soirée de cinéma d'Halloween qui continue à nous donner des frissons !




  • Il te plaît, mon masque ?

  • Quand l'as-tu fabriqué ?

  • Hier. J'aime bien, ça me cache le visage.

  • Tu n'as pas à cacher ton visage. Enlève-le.

  • Comme ça, je suis moins vilain.

  • Ne dis pas ça. Enlève-le. Tu n'es pas vilain. Tu ne dois pas dire ça, d'accord ?

  • D'accord.



Ma critique du film en duo sur la chaîne YouTube de Venom-31 : https://www.youtube.com/watch?v=qS54tYbp4-k

B_Jérémy
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Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur et l'a ajouté à ses listes Classement du meilleur au pire des films d'horreur dont j'ai fait une critique et Les meilleurs slashers

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le 31 oct. 2023

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