Lorsqu'ils ont été sollicités pour la création de Halloween III, John Carpenter et Debra Hill furent réticents. Ils acceptèrent de participer au nouveau projet seulement si le film n'était pas une suite de Halloween II, ce qui signifiait la disparition de Michael Myers.
Ils voulaient raconter des histoires indépendantes, et ne pas s’enliser dans une succession de slashers pâlichons et répétitifs, bien que toujours liées à la fête d'Halloween, afin de constituer une anthologie dans le style de ce que The Twilight Zone fait à la télévision.
Debra Hill veut une histoire mêlant sorcellerie et nouvelles technologies qui renvoie aux sources celtiques de la fête automnale (le mot Samhainn était déjà utiliser dans Halloween II), tandis que John Carpenter va s’inspirer fortement des classiques de science-fiction des années 50 comme The Thing from Another World ou Invasion of the Body Snatchers. Cette dernière oeuvre constitue, à l'évidence, l'influence la plus sensible de Halloween III.
Ils vont chercher le scénariste Nigel Kneale que John Carpenter appréciait particulièrement pour sa série Bernard Quatermass. Peu versé dans la violence visuelle et les effusions de sang, Kneale rend une histoire plus psychologique qu'explicite, ce qui ne convient pas à Dino De Laurentiis (principal investisseur avec Moustapha Akkad et Irwin Yablans). Les investisseurs veulent du sang. Ils demandent à ce que le scénario soit réécrit pour y inclure des moments choc.
Pour réécrire le scénario, John Carpenter et Debra Hill font appel à Tommy Lee Wallace qui n’est pas étranger à la saga. Il était le directeur artistique de Halloween et avait été préconisé pour réaliser Halloween II avant que le choix final ne se porte sur Rick Rosenthal. Quoi qu'il en soit, Nigel Kneale, mécontent des remaniements effectués sur le scénario, exige que son nom soit retiré du générique, tandis que John Carpenter lui-même ne souhaite pas non plus être crédité.
Tommy Lee Wallace sera aussi à la réalisation.
Si il n’y a pas de Michael Myers, il n’y a pas non plus de Laurie Strode. On peut néanmoins entendre la voix de Jamie Lee Curtis dans la cabine téléphonique et dans les hauts-parleurs de la ville. Le réalisateur Tommy Lee Wallace donne aussi de la voix dans la publicité des masques Silver Shamrock.
On a aussi le plaisir de revoir brièvement Nancy Loomis alias Nancy Louise Kyes qui interprète Annie Brackett dans Halloween et Halloween II. Elle joue ici un tout autre personnage, l’ex-femme du héros. C’est une habituée des productions de John Carpentier ayant apparue dans Assault on Precinct 13 et aussi The Fog.
Si l'héroïne est sympathique, elle apparaît finalement comme la belle plante de service, le Docteur Daniel Challis attire davantage l'attention. Incarné avec truculence par Tom Atkins (qui a déjà travaillé avec John Carpentier sur The Fog et Escape from New York). Il est un coureur de jupon porté sur la bouteille qui semble surtout se soucier de lui et de ses conquêtes, négligeant ses enfants confiés à son ex-femme et passant son temps à draguer tout ce qui bouge. Il n'est pas le genre de héros qu'on a l'habitude de voir, mais il est indubitablement un personnage issue de la main de Carpenter. Si ce qui le motive à enquêter c’est sans doute les formes généreuses de Stacey Nelkin qui incarne l’héroïne, notre bonhomme s'avère finalement assez débrouillard pour prendre le chemin de l’héroïsme.
L’antagoniste étonne par sa douce méchanceté, apparaissant tel un papy gâteau soucieux du plaisir des enfants alors qu'il ne désire que leur destruction. Si le scénario reste flou sur ses origines, il semble être une sorte d'entité démoniaque issue du folklore celtique, un diable au regard bleu acier soucieux de perpétrer les traditions du Samhainn.
L’élément déclencheur est un morceau de roche volé sur le site de Stonehenge associé à des ordinateurs conçus pour le manipuler (l’association d’idée de Debra Hill). Au contraire des précédents films de John Carpenter et Rick Rosenthal où la fête apparaissait comme une unité de temps, elle est ici la source de l'intrigue, conformément à la volonté d'une anthologie lui étant consacrée. Il ne s'agit plus d'un tueur indestructible mué par le Mal Absolu, mais le mal lui-même.
On y retrouve de la sorcellerie, des rituels magiques, des lasers, des robots meurtriers, etc... Un brassage décomplexé de science-fiction. Si la mise en scène est correct, la narration est poussive. En cause, un rebondissement final mal amené. La dernière scène, rappelle tout de même par son impact, les meilleurs épisodes de la Twilight Zone.
Comme dans Halloween et Halloween II, la musique est restée très importante. Elle est de nouveau composée par John Carpenter et Alan Howarth. La composition est froide et électronique (uniquement du synthétiseur). De nombreux morceaux font sursauter alors qu'il ne se passe rien rappelant les productions des années 50.
Halloween III est très mal reçu, récoltant seulement 14.500.000$ au box-office. Dépités, John Carpenter et Debra Hill cessent de s'impliquer dans la production des suites de Halloween, lesquelles reviennent au slasher traditionnel et au serial killer Michael Myers.
Les producteurs Moustapha Akkad et Irwin Yablans sont aussi mécontents, ils ne voyaient pas d'un bon œil l'absence de Michael Myers. Selon eux, l'idée de ne pas persévérer dans la voie du slasher est stupide et en décevra beaucoup. Rétrospectivement, ils avaient raison.
Cet audacieux Halloween III a pris une direction différente en s'éloignant de l’œuvre initiale de John Carpenter, le principe de cette anthologie laisse encore rêveur aujourd'hui. Mais la promesse n'a pas suffi pour s'attirer mes faveurs. A cause de l’absence de Michael Myers, je suis passé à côté de la richesse du scénario et de sa réussite artistique.