Mon choix de mettre Hanna dans la liste "mon père ce bourreau" a déclenché une discussion intéressante avec l'ami (au sens SensCritiquien du terme) Jackal sur mon aversion possible pour les films dits "d'action". C'est cette réflexion d'abord générale qui va guider mes commentaires sur ce film particulier.



Les films d'actions en général.


Ainsi donc, j'aimerai pas ça ?
Ben si, pourquoi ? Enfin, dans des conditions particulières alors.

Pour moi, il y a quatre catégories de films d'action.
1) Ceux qui questionnent (ou dénoncent) l'action et son extension la violence.
2) Ceux qui la mette en scène dans un contexte fun et dont elle n'est qu'un des éléments.
3) Ceux qui ont le cul entre deux chaises et qui cherchent des prétextes pour l'encadrer.
4) Ceux qui ont posé le cerveau à côté et qui ne s'embarrasse pas plus de vraisemblance que de fierté.
J'aime les deux premières, j'exècre les deux autres.

La première catégorie est riche de films prodigieux. Je retiens, pour l'illustrer, deux exemples suffisamment différents pour montrer l'étendue de la palette: d'un "Straw Dogs" explosif de Peckinpah, qui met en image ce qu'il dénonce et provoque chez nous ce fort sentiment de malaise jusqu'à un beaucoup plus cérébral et sublime "l'homme qui tua Liberty Valance", film qui théorise implicitement sur son sujet plus qu'il ne le montre, nous avons une bonne idée du type de film dont je parle.
Dans ces films, souvent, l'action sous sa forme ultime, la violence, ressemble à ce que je connais d'elle dans la vie: soudaine, rapide, sale. On est loin du ballet chorégraphié. La liste est très longue, elle englobe par exemple les films de genre, comme la guerre, le western ou les récits historiques.

La deuxième est encore plus pléthorique.
Comment ne pourrais-je ne pas aimer les films d'actions quand on voit les notes que je suis capable de mettre à l'ensemble de la saga James Bond ? Que dire des Indiana Jones ? D'un grand nombre de films issus des univers fantastiques ou science fiction ?
Ici, et c'est leur point commun, l'action (comme genre) se situe dans un univers suffisamment décalé pour qu'on ne puisse tout à fait devoir se positionner pour ou contre l'attitude des acteurs de violence.
A l'image de l'univers des jeux vidéos où démonter la gueule de son ennemi me fait rire dans "Brutal Legend" mais me fait fuir dans un Battlefield ou un Call of Duty.
Éloignés d'une volonté réaliste, les scènes d'action et de violence sont inoffensives et sans enjeux autre que le plaisir du spectateur.
Et surtout, surtout, ces scènes sont inclus dans un ensemble plaisant (scénario, ambiance, histoire, musique) et n'en sont qu'un élément et non une fin en soit.

Hanna rentre dans la troisième catégorie et j'y reviens par la suite.
Mais il s'inscrit pour moi dans cette grande tradition de film qui tentent maladroitement de mettre des bouts d'histoires-prétexte juste bonnes pour surtout surtout, nous proposer des poursuites, des bagarres, des explosions et des tirs en rafales. Quand ces prétextes sombrent dans le degré zéro de la crédibilité, quand chaque scène est une insulte à l'intelligence, quand en plus l'ensemble est monté à la serpe et nous sombrons dans la quatrième catégorie.

"Expendables" est à la frontière de ce groupe poisseux grâce à un deuxième degré qui ne compense malheureusement pas l'indigence du résultat. Au-delà, un univers glauque peuplé de Van Damme, Stratham, Norris, Besson et Europacorp (je sais, j'en oublie trois millions mais l'idée est là).
Pour cette quatrième catégorie, la vie est courte et je suis trop vieux pour ces conneries.
(Tiens, puisque que nous voilà dans les citations, les "armes fatales": dans la deuxième catégorie. Feux vert, donc !)


Hanna, en particulier.
L'espèce de sérieux qui sous-tend l'ensemble est sa grande faiblesse. Les quelques très bonnes scènes du film font apparaître avec encore plus de force toute l'inanité des moments (beaucoup plus nombreux) ratés.
Prenons les deux premiers "moments" du film, qui illustrent toute la déception ressentie devant un tel long-métrage.
Toute la scène d'introduction, plongée dans un froid glacial et une neige épaisse est plutôt surprenante et réussie. On ne sait pas ce qui justifie l'éducation intransigeante d'un père pour une fille transformée en machine à tuer, en tout cas suffisamment pour nous donner l'envie d'aller plus loin.
La transition, déjà, chagrine: pourquoi tuer deux soldats pour se laisser prendre gentiment juste après ?
Allez, ne nous braquons pas, poursuivons.
La scène suivante, dans le complexe recueillant l'enfant, brise toute (bonne) inclinaison antérieure: nous sombrons dans le ridicule dans le fond et dans la forme.
La forme ? Chemical Brother à fond, lumière stromboscopiques, réalisation clipesque... Hop, je décroche.
Du coup, nous voilà projeté vers le fond. Comment une fillette qui n'a connu que les froides désolations arctiques peut-elle déjouer toutes les sécurités (portes, caméras), trouver la sortie, déjouer une armée aguerrie, perdre une escouade d'agents et j'en passe, ALORS MÊME que cette même gamine se montrera fascinée par une ampoule électrique quelques scènes plus tard ?
Pourquoi ce père élève-t-il sa fille dans cet univers de violence (qui semble subie) alors qu'il avait tellement d'autres options pour la sortir de tout ça ? Si c'est pour la sauver ou même la protéger, qu'est-ce qui l'empêchait de lui fournir une autre identité (après tout c'est un spécialiste) et lui offrir une autre vie ? Elle a des capacités spéciales ? Qu'il en fasse une sportive de haut niveau ! Cherchait-il la vengeance ? Ça devient une histoire bancale peu crédible.

Et nous voilà au cœur de ce que je dénonce: on nous raconte l'histoire de personnages improbables qui semblent subir une violence dont le film ne cherche que l'esthétisme, sans aucune réflexion. Du coup, ce n'est ni drôle, ni décalé, sans second degré. Un spectacle vain qui tourne à vide et dont les moments faibles deviennent insupportables.
Je n'ai jamais personnellement assisté à une bagarre entre agents et ex-agents dans une station de métro, mais je suis presque prêt à mettre mon pied à raboter qu'elle ne PEUT PAS ressembler à cette chorégraphie compassée filmé avec tant de conformisme.
Plus rien, désormais, ne peut m'accrocher à cet exercice formel qui ne me raconte plus rien.
Cette sale impression d'un scénariste qui aurait trop aimé Léon et qui aurait essayé de lui greffer un peu de matière grise.
Mais pour qu'une greffe tienne, il faut que le receveur (Léon) soit sain.

Bon, puis le titre est rhétorique, hein ? J'ai encore jamais vu un Bresson.
guyness

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